Dire, ne pas dire

Victoire L. (France)

Le 23 janvier 2025

Courrier des internautes

Je fais travailler à mon chœur une pièce de Francis Poulenc qui contient les mots suivants : Que la force brûlante et douce de votre amour absorbe mon âme. J’ai proposé de dénasaliser le o de mon et de prononcer monne âme ; certains choristes ont été très surpris ! Je vous écris donc, car je voudrais éviter de leur apprendre des bêtises.

Victoire L. (France)

L’Académie répond :

Vous ne leur apprendrez pas des bêtises, et vous les inviterez à réfléchir à l’évolution de la prononciation de notre langue. Il n’est pas incorrect de dénasaliser le o de mon, mais cela ne se fait plus guère. Il n’en a pas toujours été ainsi. À l’article « mon » de son Dictionnaire, Littré écrivait : « Le n se lie, et la voyelle perd le son nasal: mo-n ami. » Mais, à cette époque, deux forces contraires étaient déjà à l’œuvre : la phonétique, qui voulait la dénasalisation, et l’analogie, avec des formes où mon est suivi d’un mot à initiale consonantique (mon frère, mon chien, mon livre, etc.), qui voulait la conservation de la voyelle nasale. On lit dans le Trésor de la langue française qu’au début xxe siècle, Sarah Bernhardt prononçait la voyelle nasale, par exemple dans son œil, tandis que Maurice de Féraudy, autre acteur renommé de l’époque, disait « mo -nange » pour mon ange. Vous avez donc le choix mais, aujourd’hui, il est plus fréquent de conserver la nasalisation de ce o.