Né à Épinal, le 21 février 1881.
Originaire d’une famille protestante, républicaine et patriote, fils du préfet des Vosges, Marc Boegner passa les premières année de sa vie à Épinal, avant de s’installer avec sa famille à Orléans où il se lia d’amitié avec Charles Péguy. Après avoir achevé ses études secondaires à l’École alsacienne, à Paris, il entra en classe préparatoire de Navale, au lycée Lakanal. Un début de myopie devait cependant l’obliger à renoncer à une carrière dans la marine. Il s’orienta alors vers le droit, obtint sa licence en 1901, puis entra à la faculté de théologie protestante. Il y soutint en 1905 sa thèse de doctorat sur Les Catéchismes de Calvin, étude d’histoire et de catéchétique.
Pasteur de la paroisse d’Aouste, dans la Drôme, avant la Première Guerre mondiale, il fut nommé en 1918 pasteur de la paroisse de Passy dont il devait s’occuper jusqu’en 1953.
Le pasteur Boegner devait jouer un rôle de premier plan dans l’évolution et l’organisation du protestantisme, aussi bien à l’échelle nationale qu’à l’échelle internationale. Mû par le désir de rassembler, il assuma la présidence de nombreux organismes comme la Fédération Française des Associations chrétiennes d’étudiants (de 1923 à 1935), la Fédération Protestante de France (de 1929 à 1961), le conseil national de l’Église Réformée de France (de 1938 à 1950), la Société des missions évangéliques de France (de 1945 à 1968).
Bien qu’il n’ait jamais voulu accabler le maréchal Pétain (en faveur de qui il témoigna lors de son procès), le pasteur Boegner mit pendant l’Occupation toute son autorité morale en jeu pour tenter d’améliorer le sort des juifs et s’attacha, malgré les périls, à défendre et à sauver nombre d’entre eux, ainsi que des réfugiés politiques.
Après la guerre, il œuvra pour le renouveau du protestantisme dans le cadre du Mouvement œcuménique des Églises chrétiennes, dont il fut président de 1948 à 1954.
Docteur en théologie honoris causa de nombreuses universités étrangères, le pasteur Boegner s’est illustré autant par sa pensée que par ses actes. Ses prédications remplissent plusieurs volumes : Le Christianisme et le monde moderne (1928), Dieu, l’éternel tourment des hommes (1929), Jésus-Christ (1930), Qu’est-ce que l’Église ? (1931), Le Christ devant la souffrance et la joie (1935), Le Problème de l’unité chrétienne (1946), Ténèbres et Lumières aux abords du Calvaire (1960), etc.
Membre de l’Académie des Sciences morales et politiques depuis 1946, il fut élu à l’Académie française le 8 novembre 1962. Il fut le premier — et jusqu’à ce jour le seul — pasteur à entrer sous la Coupole.
Ayant obtenu 17 voix, au fauteuil de François Albert-Buisson, il était l’un des académiciens les plus âgés lors de son élection, puisqu’il avait 81 ans. Le fauteuil qu’il allait occuper avait eu, coïncidence qui mérite d’être relevée — pour premier titulaire en 1634, le huguenot Valentin Conrart, l’un des fondateurs et le premier secrétaire perpétuel de l’Académie.
C’est le comte Wladimir d’Ormesson qui le reçut le 6 juin 1963. Ce catholique convaincu, ancien ambassadeur près le Saint-Siège, sut trouver les mots pour rendre hommage à l’«humble grandeur » du pasteur Boegner : « Vous êtes, M. le pasteur, un homme parfaitement équilibré. La méditation absorbera une partie de votre vie. L’action animera l’autre. Celle-ci sera toujours au service de celle-là. […] Vous savez toucher l’âme dans son intime sensibilité et relier toutes choses à ce point d’infini à partir duquel l’homme n’est plus seulement une créature vivante comme il y en a tant d’autres, mais un être privilégié auquel Dieu a ouvert l’éternité. »
Mort le 18 décembre 1970.