Né à Nancy, le 24 mars 1884.
Issu d’une lignée de vétérinaires, Eugène Tisserant fait ses études primaires et secondaires dans sa ville natale, ainsi que quatre années de théologie au Grand Séminaire. Trop jeune pour être ordonné prêtre, il part pour l’École biblique des Dominicains à Jérusalem, pour une année, et poursuit ensuite à Paris sa formation, à l’École des langues orientales vivantes, à l’École des hautes études de la Sorbonne, à l’École du Louvre et à l’Institut catholique.
Ordonné prêtre le 4 août 1907, il est appelé à Rome l’année suivante et prend la charge de conservateur des manuscrits orientaux à la bibliothèque Vaticane. Diplômé en quinze langues, dont cinq langues sémitiques (hébreu, syriaque, assyrien, arabe, éthiopien), il assume dans le même temps la charge de professeur d’assyrien à l’Université pontificale de l’Apollinaire (qui deviendra ensuite l’Université du Latran), de 1908 à 1913.
Au début de la Première Guerre mondiale il est mobilisé comme soldat de première classe au 26e de ligne ; à sa sortie d’hôpital, après avoir été blessé sur le front de Nancy, en septembre 1914, il est affecté à la section d’Afrique de l’état-major de l’Armée, au ministère de la Guerre. À sa demande, il est envoyé au Proche-Orient comme officier interprète au détachement français de Palestine-Syrie, en 1917. Il finira la guerre lieutenant, croix de guerre avec citation.
De retour à Rome au printemps 1919, Eugène Tisserant retrouve son poste d’assistant du préfet à la bibliothèque Vaticane. Il ne quittera celle-ci qu’après l’avoir complètement modernisée et hissée au rang de bibliothèque de renommée mondiale au moment de son cardinalat.
De nombreuses missions d’études lui sont confiées pendant cette période, elles le mèneront en particulier en Slovénie, Croatie, Serbie, Roumanie, Hongrie, Bulgarie, Turquie, Liban, Syrie, Palestine, Égypte, Grèce, et aux États-Unis.
Il est nommé en 1920 membre de la Commission chargée de la révision des livres liturgiques syriaques à la S. Congrégation pour l’Église orientale, consulteur de la S. Congrégation pour l’Église orientale en 1926, et membre de la section historique de la Congrégation des rites en 1930.
Créé cardinal le 15 juin 1936, le pape Pie XI lui confie la direction de la S. Congrégation pour l’Église orientale avec le titre de secrétaire, poste qu’il conservera jusqu’en 1959.
Sacré archevêque titulaire d’Iconium en 1937, il opte pour le diocèse suburbicaire de Porto-et-Sainte-Rufine en janvier 1946 ; conformément aux décisions prises par le concile de Vatican II, il en sera déchargé en 1966 après y avoir construit une cathédrale et plus de vingt églises. Ses successeurs le qualifieront de « refondateur » de cet antique diocèse, un des premiers de la chrétienté.
Il est également nommé président de la Commission pontificale des études bibliques, préfet de la Congrégation cérémoniale, membre de la Congrégation consistoriale, de la Congrégation des affaires extraordinaires, de la Congrégation des religieux, de la Propagande, du Tribunal de la signature apostolique, de la Congrégation des rites, de la Commission pontificale pour la rédaction du Code de droit canonique oriental, ainsi que des universités et séminaires.
Doyen du Sacré Collège en 1951, il reçoit un second diocèse alors attaché à la charge, celui d’Ostie antique.
En 1957, Pie XII le nomme bibliothécaire et archiviste de la Sainte Église romaine. Président de la Commission préparatoire au concile de Vatican II, il en assumera la présidence du Conseil de présidence pendant son déroulement.
Eugène Tisserant est l’auteur de dix-sept ouvrages d’érudition dont : L’Ascension d’Isaïe (1909) ; Specimina codicum orientalum (1914) ; Louis-Marie Grignion de Montfort, les écoles de charité et les origines des Frères de Saint-Gabriel (1960). On lui doit également treize contributions au Dictionnaire de théologie catholique, plus de soixante-quinze articles parus dans des revues scientifiques, au moins trente-deux recensions d’ouvrages spécialisés, etc.
Savant incontesté, travailleur acharné, Eugène Tisserant est non seulement un orientaliste réputé et reconnu par ses pairs, mais également un historien et un scientifique scrupuleux et précis. Il n’en néglige pas pour autant son ministère de prêtre.
Si toute sa carrière se déroule à Rome, il n’en reste pas moins très attaché à la France et à sa Lorraine natale. Résistant de la première heure, il soutient les œuvres qui le sollicitent, il cherche toujours à favoriser et à aider ceux de ses compatriotes qui font appel à lui.
Il préside en particulier le Comité international créé au début de 1957 pour assurer le financement de la construction de la basilique souterraine Saint-Pie X et les manifestations du centenaire des apparitions de Lourdes en 1958.
Docteur honoris causa de quatorze universités étrangères, il est membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres depuis 1938. Grand-croix de la Légion d’honneur en 1957, le cardinal Tisserant est élu à l’Académie française le 15 juin 1961, sans concurrent, par 17 voix au fauteuil du duc Maurice de Broglie.
Il est reçu le 23 juin 1962, dans le grand amphithéâtre de la Sorbonne, par le comte Wladimir d’Ormesson.
Il est déchargé de ses dernières fonctions en avril 1971 et meurt le 21 février 1972 à Albano-Laziale (Rome).