Les verbes engouer et enrouer sont des paronymes dont les sens ne sont pas très éloignés, mais qu’il importe cependant de ne pas confondre. Enrouer est dérivé de l’ancien français roe, adjectif issu du latin raucus, « rauque », et il signifie, conformément à son étymologie, « rendre la voix rauque, moins nette et moins libre qu’à l’ordinaire ». Engouer, tiré d’une racine prélatine, à laquelle on doit aussi les mots joue et gaver, a d’abord signifié « embarrasser, empêcher le passage du gosier ». Cette définition était éclairée dans les sept premières éditions de notre Dictionnaire par cet exemple : « Ce canard avala un morceau trop gros, qui l’engoua. » Aujourd’hui, plus de volatile, mais un verbe qui s’emploie ordinairement à la voix pronominale : À force de crier, il s’engoua. Il est vrai que, dans certains cas, qui s’engoue, au sens concret du terme, peut s’enrouer. Cela étant, si on le rencontre de nos jours, c’est principalement au figuré, avec le sens de « s’enthousiasmer pour une personne, pour une chose, en être entêté », un sens illustré ainsi dans notre Dictionnaire : « On ne sait pourquoi cette femme s’est engouée de ce freluquet. » Le passage du sens propre au sens figuré s’est fait par référence à l’idée de plénitude, comme dans « avoir plein la bouche de quelque chose ou de quelqu’un ».