Dire, ne pas dire

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«La distance est-elle proche ?

Le 8 janvier 2024

Emplois fautifs

Le nom distance désigne un intervalle que l’on peut déterminer et qui sépare deux points de l’espace, deux éléments donnés. Cette distance est une longueur mesurable, qui pourrait s’exprimer en mètres, en kilomètres, etc. En fonction de cette longueur, on dira donc que la distance est considérable, importante, grande, moyenne, petite, réduite, minuscule, mais on n’emploiera pas pour la qualifier des adjectifs comme proche, lointaine ou éloignée, puisque ce sont les deux points, les deux éléments séparés par cette distance qui le sont, et non la distance elle-même.

Un tutoriel : « des tutoriels » ou « des tutoriaux »

Le 7 décembre 2023

Emplois fautifs

Au Moyen Âge les mots en -el eurent un pluriel en -eux ou en -eus. On écrivait ainsi tieus quand nous écrivons tels. Nous avons conservé quelques traces de ce phénomène avec cieux et cheveux. La forme ancienne de ce dernier au singulier était en effet chevel et son pluriel cheveux. Mais comme ce nom s’employait beaucoup plus souvent au pluriel, on a refait, à partir de ce dernier, un singulier cheveu. Aujourd’hui les pluriels des mots en -el sont, de façon régulière, en -els. On dit donc un tutoriel, des tutoriels et non des tutoriaux, comme on l’entend parfois.

« Donne-moi-s-en » ou « Donne-m’en »

Le 7 décembre 2023

Emplois fautifs

Pour éviter le hiatus entre une forme verbale et un pronom, ou entre deux pronoms, le français ajoute entre eux, dans certains cas, des consonnes euphoniques ; ce peut être un t, comme dans mange-t-elle bien ? ou un s, comme dans manges-en deux. Dans d’autres cas, on élide le pronom. Ainsi, à la 2e personne du singulier de l’impératif, à la forme positive, on écrit va-t’en ou retourne-t’en. Sur ce même principe, on écrit donne-m’en. C’est cette forme qu’il faut employer, même si la tentation peut être forte d’utiliser, par analogie avec donne-nous-en, les formes donne-moi-s-en ou donnes-en-moi. Rappelons enfin que si le pronom en commande l’élision du pronom qui le précède, il n’en va pas de même avec la préposition homonyme en. On dit donc, par exemple, donne-moi en priorité …, retourne-toi en partant.

« Préférenciable » pour « Préférable »

Le 7 décembre 2023

Emplois fautifs

De certains verbes des 1er et 3e groupes sont dérivés des adjectifs qualificatifs en -able, qui indiquent que l’action exprimée par ce verbe peut être réalisée, comme c’est le cas avec mangeable, faisable, prenable, etc. Ces adjectifs ne peuvent être tirés de noms. S’il existe une forme différenciable, c’est parce qu’existe aussi un verbe différencier, mais comme il n’y a pas de verbe préférencier, « préférenciable » est incorrect. Pour rendre l’idée notée par cette forme fautive, c’est bien sûr préférable, un dérivé de préférer, qu’il faut employer.

Il a déjà couru 19-83

Le 2 novembre 2023

Emplois fautifs

Le sport et la vitesse sont liés. Sera vainqueur qui courra ou nagera le plus vite ; une course d’élan plus rapide donnera des sauts plus longs et les engins de lancer iront d’autant plus loin qu’ils quitteront plus rapidement la main qui les propulse.

Mais ce qui vaut pour le geste sportif ne vaut pas obligatoirement pour le commentaire, qui ne doit pas s’affranchir des règles grammaticales. On dira donc de tel sprinteur qu’il a déjà couru (le 200 mètres) en 19 secondes 83 centièmes, voire « en 19-83 », mais non qu’il a déjà « couru 19-83 ».

 

on dit

on ne dit pas

Il a couru le 1 000 mètres en 2 minutes 44 secondes

Il a couru 2-44.

Payer en carte

Le 2 novembre 2023

Emplois fautifs

La locution verbale payer en suppose que l’on verse ce que désigne le nom introduit par la préposition en. C’est pourquoi on dit : payer en espèces, payer en liquide, en petite monnaie, mais aussi payer en euros, en dollars, en mitraille, en numéraire, voire payer en beaux discours. Quant à l’expression payer en nature, elle signifie « payer avec les productions de la terre » et, par extension, « accorder ses faveurs en échange d’un service, d’un bien ». Quand on veut indiquer le moyen par lequel on paie, ou la fréquence à laquelle on paie, c’est payer par que l’on emploie et l’on dira donc payer par mensualités, par virement bancaire, par prélèvement automatique, payer par carte (bancaire). On s’efforcera de bien choisir la préposition convenant à tel ou tel complément et l’on emploiera « payer par carte » et non « payer en carte ». Avec le mot chèque, on trouve plus souvent « payer par », mais « payer en » peut se rencontrer puisque l’on donne un chèque à la personne que l’on règle.

Vers-z-une heure de l’après-midi

Le 2 novembre 2023

Emplois fautifs

La liaison et l’élision permettent d’éviter nombre d’hiatus et assurent de la fluidité à la phrase. Omettre ces liaisons lui donnerait un caractère par trop heurté ; c’est donc une faute dont il faut se garder. Mais il convient aussi d’éviter l’erreur inverse, qui consiste à faire des liaisons quand l’usage n’en veut pas. On rappellera donc que dans les mots terminés par -rt et par -rs, ce s et ce t ne se lient pas au mot qui les suit. La liaison peut être faite avec le t de l’adverbe fort (mais non avec celui de l’adjectif). On dira donc ver(s) une heure de l’après-midi et non ver-z-une heure de l’après-midi, ou encore Où dor(t) Albert ? et non Où dort-t-Albert ?

Ajoutons cependant que, dans les mots terminés par une double consonne dont la dernière est un s, la liaison se fait généralement au pluriel, et marque ainsi celui-ci ; on dira donc un ver(s) admirable mais des vers-z-admirables.

 

on dit

on ne dit pas

Je par(s) en voyage

Son frère est for(t) en allemand

Il s’est mal comporté enver(s) elle

Je par-z-en voyage

Son frère est fort-t-en allemand

Il s’est mal comporté envers-z-elle

« En raison même » ou « En raison-même » ?

Le 2 novembre 2023

Emplois fautifs

Quand il est placé directement après un nom, un adverbe ou un pronom qui n’est pas un pronom personnel, l’adjectif indéfini même souligne l’identité, la spécificité de la personne ou de la chose dont on parle : L’incident s’est produit le jour même de son départ. C’est cela même. Il est arrivé aujourd’hui même. Même s’emploie aussi après un nom qui désigne une qualité pour signifier que cette qualité est au plus haut degré chez la personne dont on parle. Pierre, c’est l’honnêteté même. Dans tous ces cas, même est séparé du mot qui le précède par une espace.

Il en va autrement avec le pronom personnel, qui, lui, est lié à même par un trait d’union. On écrit donc : Vous-même l’avez affirmé l’autre jour. Connais-toi toi-même. Cet ami est comme un autre moi-même.

 

on écrit

on n’écrit pas

Il est arrivé le jour même

En raison même de ses acquis, il sera dispensé d’examen

L’incident a eu lieu ici même

Savoir rester soi-même

Il est arrivé le jour-même

En raison-même de ses acquis, il sera dispensé d’examen

L’incident a eu lieu ici-même

Savoir rester soi même

Comment prononcer Villon ?

Le 5 octobre 2023

Emplois fautifs

La prononciation des noms propres, plus encore que celle des noms communs, est affaire d’usage plus que de règles, ce qui peut amener quelques hésitations pour des formes anciennes. C’est parfois le cas avec le nom Villon. D’aucuns pensent que, dans ce mot, le groupe ill se prononce comme dans fille, d’autres qu’il se prononce comme dans ville. Mais Villon nous a donné lui-même toutes les clés pour répondre à cette question. Il se met en effet souvent en scène dans ses poèmes et il suffit donc de voir avec quels termes il fait rimer son nom. La récolte est riche. Dans le Testament, Villon rime avec pavillon, mais aussi avec escouvillon, maillon, gouppillon, sillon, aguillon, tourbillon, bouillon, corbillon. Et notre auteur termine par ces vers sa Ballade pour servir de conclusion :

« Icy se clost le Testament

Et finist du pouvre Villon.

Venez à son enterrement,

Quant vous orrez le carillon,

Vestuz rouges com vermillon. »

Le fauteur est-il fautif ?

Le 5 octobre 2023

Emplois fautifs

On confond parfois les mots fauteur et fautif en les faisant dériver, tous deux, du nom faute. Si ce lien est valable pour le nom fautif, qui désigne celui qui est dans son tort, qui est en faute, qui est coupable, il ne l’est pas pour fauteur, un nom emprunté du latin fautor, « personne qui favorise », lui-même dérivé de favere, « être favorable ». Si l’on prend parfois l’un de ces deux noms pour l’autre, c’est aussi, au-delà de la confusion étymologique, parce que fauteur, dont le sens était jadis neutre, et qui désignait une personne favorisant un parti ou appuyant une opinion, s’emploie aujourd’hui avec un sens péjoratif pour désigner l’initiateur d’une action généralement néfaste. C’est pour cette raison qu’on le trouve essentiellement dans la locution fauteur de troubles et dans quelques autres de sens proche, comme fauteur de désordre, fauteur de guerre, de haine, fauteur de scandale.

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