Dire, ne pas dire

Chafouin

Le 5 octobre 2023

Extensions de sens abusives

Le mot chafouin est formé à l’aide des noms chat et fouine et emprunte, pour le sens, des traits que l’on prête à l’un et à l’autre de ces animaux : d’abord des caractères physiques puisqu’on lit, dans l’édition de 1762 de notre Dictionnaire, à l’article chafouin : « qui est maigre, de petite taille ». Mais s’y ajoutent surtout les défauts qu’on leur attribue traditionnellement. On sait que dans Le Roman de Renart, Tibert le chat en remontre au goupil en matière de ruse. Quant à la fouine, elle est encore plus mal considérée. Littré glose ainsi l’expression Avoir un visage, une tête de fouine :« avoir un faciès étroit et une physionomie sournoise », et il ajoute qu’on donne le nom de fouine, « dans le langage figuré des sauvages de l’Amérique du Nord, à un homme qui attaque traîtreusement son ennemi », en illustrant son propos avec ce passage des Natchez de Chateaubriand : « L’Iroquois n'est pas une fouine, il ne suce pas le sang de l’oiseau qui dort. »

Le chafouin est donc, comme l’indique notre Dictionnaire, une personne qui a une physionomie basse et sournoise, et l’on pourrait ajouter, en reprenant ces mots de Littré : « indiscrète, maligne et rusée ». C’est déjà beaucoup pour une seule personne, aussi peut-il sembler inutile, et surtout incohérent, d’ajouter à ces sens ceux de bougon, boudeur, morose, voire grincheux ou râleur, qui ont peu à voir avec la ruse et la sournoiserie.

on dit

on ne dit pas

Perdre l’a rendu boudeur, grincheux

Un râleur qui n’est jamais satisfait

Perdre l’a rendu chafouin

Un chafouin qui n’est jamais satisfait