Dire, ne pas dire

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Pire employé comme adverbe

Le 6 février 2014

Emplois fautifs

Le comparatif de l’adverbe bien est mieux ; celui de l’adjectif bon est meilleur. Ces formes sont assez éloignées phonétiquement pour qu’il y ait peu de risques qu’elles soient confondues. Il n’en va malheureusement pas de même pour les comparatifs de mal et de mauvais, qui sont respectivement pis et pire. On se souviendra pourtant que pire est un adjectif et que l’on ne doit pas l’employer comme adverbe, même s’il s’agit là d’une faute très répandue.

On dit

On ne dit pas

Ses affaires vont de mal en pis

Tant pis s’il arrive en retard

Ses affaires vont de mal en pire

Tant pire s’il arrive en retard

 

Absence de liaisons après les adjectifs numéraux cardinaux

Le 6 janvier 2014

Emplois fautifs

Les adjectifs numéraux cardinaux sont, tout comme les articles, les adjectifs possessifs, démonstratifs, indéfinis, interrogatifs et exclamatifs, des déterminants et caractérisent le nom qu’ils précèdent. Ils sont donc étroitement attachés à ce nom et, phonétiquement, se lient avec lui quand celui-ci commence par une voyelle ou par un h muet. On dit deux (z)heures, cinq (k)ans, etc. Cette règle s’applique à tous les noms sans exception, et donc aussi au nom euro. Il est vrai que depuis l’écu, qui fut une monnaie utilisée pendant plus de cinq siècles, depuis Louis IX jusqu’à 1793, année où furent frappés les écus dits républicains, la France n’a plus eu de monnaie dont le nom commençait par une voyelle : francs, napoléons, louis, sous et autres livres ont peut-être contribué à faire oublier la nécessité des liaisons avec les numéraux. Ces liaisons sont néanmoins nécessaires y compris après vingt et cent qui, rappelons-le, prennent un s lorsqu’ils sont multipliés et non suivis d’un autre nombre (quatre-vingts ans mais quatre-vingt-deux ans ; deux cents livres mais trois cent quatre livres).

On dit

On ne dit pas

Un (n)euro, vingt(t)euros, cent(t)euros

Quatre-vingts(z)euros, sept cents (z)euros

Un / euro, deux / euros, vingt / euros

Quatre-vingts / euros, sept cents / euros

 

Contrôler au sens d’être maître

Le 6 janvier 2014

Emplois fautifs

Le nom contrôle est un dérivé de rôle, lui-même emprunté au latin médiéval rollus, désignant un morceau de parchemin qu’on conservait roulé sur lui-même. Le premier sens de rôle est celui de « liste inscrite sur un rouleau de papier ». Pour vérifier que ce qui était porté sur cette première liste était exact, on en établissait une deuxième, appelée « contre rôle », qui, par haplologie, a ensuite donné contrôle. On s’efforcera de garder à contrôle son sens originel de « vérification » et on évitera de lui donner, sous l’influence de l’anglais control, le sens de « maîtrise, conduite ou commandement ». Il en va naturellement de même pour contrôler qui signifie « vérifier » et non « se rendre maître de ». La confusion entre ces sens peut engendrer bien des malentendus. Ainsi dans Le Babélien, Étiemble écrit : « Je me suis laissé dire, à propos des sens de control, que si les Anglais ont bombardé Mers-el-Kébir en 1940, c’est par suite d’une méprise sur les sens différents du verbe anglais to control et du français contrôler. » Même si les conséquences de ces impropriétés ne sont, Dieu merci, pas toujours aussi dramatiques, on s’efforcera de ne pas donner à ces termes des sens qui ne sont pas les leurs. Est-il besoin de préciser que la locution anglaise under control est à proscrire en français ?

On dit

On ne dit pas

Nous maîtrisons la situation

La limitation des naissances

Nous sommes maîtres de la région

La situation est sous contrôle

Le contrôle des naissances

Nous contrôlons la région

 

Fuiter

Le 6 janvier 2014

Emplois fautifs

Raymond Queneau avait fait de fuiter, dans son ouvrage Loin de Rueil, une variante plaisante du verbe fuir. Mais depuis quelques années, ce verbe a pris un nouveau sens et signifie, s’agissant d’un document secret ou d’une information confidentielle, « être diffusé illicitement ». On peut noter l’habileté grammaticale du procédé qui consiste à placer ces informations en position de sujet pour leur conférer une forme d’autonomie et rejeter ainsi dans l’ombre le responsable des fuites, mais on veillera, cela étant, à user de tours plus appropriés, bâtis à partir de verbes ou de locutions verbales comme divulguer, diffuser, rendre public, etc.

On dit

On ne dit pas

 

Des informations confidentielles ont été divulguées

Des éléments du rapport ont été irrégulièrement rendus publics

 

Des informations confidentielles ont fuité

Des éléments du rapport ont fuité

 

Informer une décision

Le 6 janvier 2014

Emplois fautifs

Le verbe informer est polysémique. On l’emploie avec un sens très précis en philosophie : l’âme informe le corps, c’est-à-dire qu’elle lui donne une forme déterminée. En droit, il se construit intransitivement et signifie « conduire une instruction en matière pénale » : le juge d’instruction est tenu d’informer. Mais son sens le plus fréquent est celui de « mettre au courant quelqu’un de tel ou tel fait ». Dans ce dernier cas, le complément d’objet direct du verbe est une personne. On évitera de construire ce verbe avec un complément d’objet direct inanimé en lui donnant le sens de « motiver, justifier, argumenter » qu’a parfois l’anglais to inform, et l’on préfèrera user de l’un de ces verbes ou de périphrases contenant les noms information ou explication.

On dit

On ne dit pas

Motiver une décision

Donner des informations justifiant un choix, expliquer un choix

Informer une décision

Informer un choix

 

Développer au lieu de mettre au point

Le 5 décembre 2013

Emplois fautifs

Le verbe développer signifie d’abord « débarrasser de ce qui enveloppe », puis « faire croître, donner de la force, de l’ampleur à quelque chose ». Il convient de ne pas lui donner, faute qui malheureusement tend à se répandre, le sens de « mettre au point ». En effet cette locution verbale s’emploie pour évoquer les réglages et les retouches qui permettront le bon fonctionnement d’un moteur, d’une machine et, plus généralement, d’un dispositif complexe. On dira ainsi qu’on développe une idée, c’est-à-dire qu’on lui donne de l’ampleur, alors qu’on met au point un plan, c’est-à-dire qu’on en règle les derniers détails. Si certains noms peuvent être compléments de ces deux formes, une argumentation par exemple peut être développée ou mise au point, on veillera à ne pas confondre ces dernières. On évitera également d’employer l’anglicisme Développer un cancer.

 

On dit

On ne dit pas

Développer l’industrie aéronautique

Mettre au point un système de freinage

Mettre au point l’industrie aéronautique

Développer un système de freinage

 

D’ailleurs, par ailleurs

Le 5 décembre 2013

Emplois fautifs

Ces deux expressions ne doivent pas être confondues. D’ailleurs, au sens propre, signifie « d’un autre endroit, d’autres endroits » : Il en est venu de toute la région, et même d’ailleurs. Au figuré, cette locution a le sens de « du reste, au reste » et s’emploie alors le plus souvent avec une valeur concessive. Par ailleurs signifie d’abord « par un autre chemin » : Je suis allé à sa rencontre et ne l’ai pas vu ; il a dû passer par ailleurs. Il s’emploie au figuré avec le sens de « d’un autre côté, par un autre moyen ». On s’efforcera de garder à chacune de ces expressions ses nuances et de ne pas employer l’une pour l’autre.

 

On dit

On ne dit pas

Il voit peu son frère, qui d’ailleurs ne s’en plaint pas

Il était latiniste et par ailleurs féru de chimie

Il voit peu son frère, qui par ailleurs ne s’en plaint pas

Il était latiniste et d’ailleurs féru de chimie

 

Paraît-il que

Le 5 décembre 2013

Emplois fautifs

Le verbe paraître, employé dans des tournures impersonnelles, peut se construire avec une proposition complétive introduite par que : Il paraît qu’elle va venir demain. On peut également l’utiliser, cette fois sans complétive, en incise, avec inversion du pronom impersonnel sujet : Elle va, paraît-il, venir demain. Mais c’est une incorrection de mêler ces deux formes. Rappelons aussi que la forme familière à ce qu’il paraît ne doit pas s’employer dans une langue soignée.

 

On dit

On ne dit pas

Il paraît qu’il va neiger

Il est, paraît-il, très riche

Paraît-il qu’il va neiger

Paraît-il qu’il est très riche

 

 

Territoire

Le 5 décembre 2013

Emplois fautifs

Ce nom, dérivé de terre, désigne une étendue géographique plus ou moins vaste où vivent habituellement tels ou tels peuples, telles ou telles espèces. Il est aussi utilisé dans le vocabulaire politique et administratif. On parle ainsi du territoire national. Il peut aussi désigner, par extension, le domaine de recherche de telle ou telle discipline et Emmanuel Le Roy Ladurie a ainsi intitulé un de ses ouvrages : Le Territoire de l’historien. Mais on évitera de faire de ce nom un synonyme un peu flou qui pourrait désigner toute division administrative du territoire. Territoire ne doit donc pas être employé en lieu et place d’autres termes plus précis comme canton, département ou région. Il n’est pas non plus synonyme de province. On peut d’ailleurs légitimement se demander ce que ce dernier nom a de si redoutable ou de si haïssable pour qu’on tende à le faire sortir de notre vocabulaire puisque après l’avoir remplacé par région (« aller en région ») on lui substitue aujourd’hui territoire.

 

On dit

On ne dit pas

Une réorganisation des départements, des régions

Visiter la province

Un redécoupage des territoires
 

Visiter les territoires

 

Fratrie et phratrie

Le 7 novembre 2013

Emplois fautifs

Voici deux termes, cette fois parfaitement homonymes, qui ne doivent pas être confondus. Fratrie est un dérivé savant du latin frater, « frère » ; il appartient à l’origine au vocabulaire de la démographie et désigne l’ensemble des frères et sœurs d’une même famille. Phratrie, plus rare, ressortit d’abord au vocabulaire des institutions grecques : il est emprunté du grec phratria, qui désignait une association de citoyens liés par une communauté de rites et appartenant à la même tribu. Ce terme a été repris par la suite par les anthropologues pour désigner un ensemble de clans qui se disent apparentés. Phratia est dérivé de phratêr, « membre d’un clan », et non pas « frère biologique ». Pour évoquer cette dernière notion, les Grecs avaient d’autres mots, parmi lesquels adelphos, « frère », et adelphé, « sœur », qui signifiaient proprement « (nés d’) un seul utérus ».

 

On dit

On ne dit pas

Une fratrie de quatre enfants

En Grèce, une tribu était formée de trois phratries

Une phratrie de quatre enfants

En Grèce, une tribu était formée de trois fratries

 

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