Si l’on veut bien nous pardonner ce léger anachronisme, nous nous permettrons de citer ce passage des Vies des douze Césars, dans lequel Suétone rappelle l’attachement que Tibère portait à sa propre langue, particulièrement quand il s’exprimait en tant que chef d’État. Il n’est certes pas question de faire de cet empereur un parangon du politicien accompli, mais de rappeler qu’il n’est peut-être pas mauvais que les hommes d’État s’expriment dans la langue du pays dont ils ont la charge. Voici donc ce qu’écrit Suétone (Tibère, LXXI) : « Quoiqu’il parlât le grec couramment et sans peine, il n’en fit pas usage indifféremment partout, et s’en abstint surtout au Sénat, au point qu’avant de prononcer le mot monopole, il s’excusa d’être forcé de recourir à un terme étranger. Une autre fois même, comme il avait, durant la lecture d’un sénatus-consulte, entendu le mot emblema, il déclara qu’il fallait remplacer ce terme et chercher un mot latin pour le substituer à ce vocable étranger, ou, si l’on n’en trouvait pas traduire la chose même en plusieurs mots, en employant une périphrase. »