RAPPORT SUR LES CONCOURS DE L’ANNÉE 1911
DE
M. THUREAU-DANGIN
Secrétaire perpétuel
Messieurs,
Il y a deux ans, votre rapporteur exprimait le regret que l’Académie n’eût pas de prix spécial pour le roman et il émettait le vœu qu’un nouveau baron Gobert vînt combler cette lacune. Depuis lors, une libéralité, faite, comme nous souhaiterions qu’il y en eût davantage, sans précision d’emploi, nous a permis de fonder un grand prix de dix mille francs, destiné à récompenser un roman ou une autre œuvre d’imagination en prose. Si l’Académie n’a pas cru devoir décerner le prix, cette année, que les concurrents futurs n’en soient pas découragés. Plus la couronne est difficile à atteindre, plus elle doit exciter les ambitions généreuses. Mais je ne saurais trop insister sur une condition essentielle du prix : l’Académie demande une « œuvre d’inspiration élevée ». Nous nous refusons à transiger avec la bassesse, de quelque prétexte qu’elle se couvre ; nous ne voulons pas encourager les attardés qui se complairaient encore dans ce que J.-J. Weiss — un libre esprit, j’imagine, et un lettré de race — appelait « la littérature brutale ». L’Académie a confiance que les jeunes générations entendront son appel et se plieront avec allégresse à ses exigences.
C’est parce que nous avons reconnu cette inspiration élevée dans le livre de M. Péguy, le Mystère de la Charité de Jeanne d’Arc, que, sans nous arrêter à certaines objections, nous lui avons attribué l’un de nos prix les plus considérables, le prix Estrade Delcros, que nous décernons tous les cinq ans. La seule conception du sujet en révèle l’originalité. L’auteur n’écrit pas un récit appuyé sur des pièces d’archives ; il fait œuvre d’imagination, je dirais volontiers de poésie, d’autant que certaines parties ont l’allure et le rythme d’une sorte de poème lyrique. Il imagine Jeanne d’Arc à treize ans, avant qu’elle appartienne à l’histoire, et il cherche à représenter ce que devait être alors l’état de son âme. C’est une paysanne, et là n’est pas le moindre attrait pour ce lettré qui s’enorgueillit de son origine populaire et qui aspire à redevenir, comme il dit, « un paysan de chez nous » ; mais c’est une paysanne en gestation de sainteté, prédestinée à une mission surnaturelle, et cet aspect du sujet, loin d’être laissé dans l’ombre par l’écrivain est celui auquel il s’attache le plus, quoiqu’il ne se dissimule pas que « dans ce temps moderne », une telle entreprise « soit comme une gageure ». Il qualifie donc de « mystère », de « mystère de sainteté », ce qu’il nous invite à contempler. Aussi bien, en présence de cette histoire plus qu’humaine, ce mot de mystère s’impose à ceux-là mêmes qui ne font qu’œuvre stricte d’historien, mais qui le font avec loyauté et clairvoyance : dans l’admirable monument qu’il vient d’élever à la mémoire de Jeanne, l’un de nos confrères, des plus qualifiés parmi les historiens, n’a-t-il pas divisé son travail en ce qu’il a appelé « les quatre mystères de la vie de Jeanne d’Arc » ?
Le cadre de M. Péguy est d’une simplicité primitive. Jeanne, tout en gardant ses moutons sur un coteau de la Meuse, épanche son âme, soit seule, soit en causant avec une compagne plus jeune, la petite Hauviette, ou avec une religieuse, Mme Gervaise. Monologues et dialogues, lamentations, prières, digressions sur la passion du Christ se continuent durant deux cent cinquante pages, tout concourant à une même impression qui se dégage à la fin singulièrement intense : sur le fond sombre de la France ravagée par la guerre, ressort, comme en traits de flamme, la charité dont brûle le cœur de cette fillette, qui ne peut détacher sa pensée ni prendre son parti de tant de souffrances et surtout de tant de crimes. Rien ne la distrait de la vision douloureuse. « Ame insatiable, âme inquiète, on dirait que tu as consommé toute la tristesse de la terre », lui dit la bonne petite Hauviette qui, elle, prend docilement le temps comme il vient. La foi de Jeanne a peine à comprendre que son Dieu permette tant de mal ; elle n’a pas encore la paix et la lumière que lui apporteront plus tard ses voix. Mais elle ne s’abandonne pas à gémir : elle aspire à combattre et ressent un remords de son inaction. Par instants, passent, à travers le dialogue, des éclairs qui illuminent ce qui se forme en elle de résolution intrépide. En évoquant les scènes de la Passion, Mme Gervaise a rappelé l’abandon des disciples et le reniement de Pierre ; Jeanne ne peut se contenir : « Je crois que, si j’avais été là, s’écrie-t-elle, je ne l’aurais pas abandonné. » Vainement Mme Gervaise la reprend, multiplie les explications, lui reproche de « penser orgueilleusement », Jeanne ne discute pas, ne se défend pas, mais elle répète obstinément, dix fois, vingt fois, la même protestation « Non, des chevaliers français, des paysans français, des gens de chez nous ne l’auraient pas abandonné... Jamais nos saints ne l’auraient abandonné ; c’étaient des saints qui n’avaient pas peur des coups. »
Si haut cependant qu’elle prise le courage, ce n’est pas de là seulement qu’elle attend le salut. Elle l’attend d’un miracle, sans avoir conscience qu’elle en sera l’instrument. Nous avons besoin, dit-elle, « de quelque chose de nouveau, de quelque chose qu’on n’aurait encore jamais fait... de saintes, de nouvelles saintes qui inventeraient de nouvelles sortes ». Et elle crie à Dieu : « C’est vous qu’il nous faudrait, et que l’on vît passer sur la terre la marque de votre main. » Plus on avance, plus se laisse ainsi pressentir la vocation surnaturelle qui se manifestera bientôt. On devine qu’une sainteté héroïque s’élabore dans cette âme de petite paysanne, qu’elle se mûrit pour la mission à laquelle elle est prédestinée. Puis, tout d’un coup, le dialogue se termine sur cette phrase que Jeanne se murmure à elle-même, que rien ne rattache à ce qui précède, et qui semble la révélation d’un mystère tout intérieur : « Orléans, qui êtes au pays de Loire. »
Que, dans cette œuvre, il y ait des étrangetés, des hardiesses qui surprennent notre goût, peut-être aussi, bien que je n’en sois nullement assuré, quelques incorrections théologiques, je n’y contredis pas. Qu’il y ait surtout des longueurs, des redites, donnant parfois l’impression d’un écrivain qui, ayant essayé plusieurs formes pour exprimer sa pensée, n’aurait su prendre le parti d’en sacrifier aucune ; que l’auteur se soit même fait de ces répétitions un système, une manière qui semble bien près d’être une manie, j’en conviens et je le regrette ; je le regrette d’autant plus que, dans les ouvrages parus depuis, il ne laisse voir aucune velléité de s’amender. Sur le tort d’un tel procédé, je n’ai rien à apprendre à M. Péguy lui-même ; ailleurs, à propos clé certain vers dans lequel Victor Hugo avait essayé d’enfermer et de condenser toute une pensée, tout un tableau, il a écrit Ce qui prouve qu’un vers est toujours plus grand que plusieurs vers, comme aussi un mot est toujours plus grand que plusieurs mots. » Et il ajoutait avec une sévérité que j’hésiterais à lui appliquer : « Aussi je ne peux pas souffrir les personnes qui mettent plusieurs mots ([1]). » Mais, quelque part que l’on fasse à ces critiques, elles ne sauraient nous faire perdre de vue les réelles beautés du livre. Lisez-le jusqu’au bout et surtout relisez-le, vous vous sentirez transporté en des régions où ne s’élève pas souvent la littérature contemporaine. À qui produit de telles impressions, peut-il être beaucoup pardonné.
C’est au Mystère de la Charité de Jeanne d’Arc que le prix a été attribué. Je n’ai donc pas à examiner l’œuvre entière de M. Péguy, entre autres ces Cahiers de la Quinzaine qui, du fond d’une humble boutique du quartier de la Sorbonne, ignorés de la foule, médités passionnément par un petit groupe d’intellectuels, ont agité, pêle-mêle, au hasard de l’improvisation, souvent avec emportement, tant d’idées dont plusieurs appelleraient mes réserves ou mes contradictions. Il n’est pas toutefois sans ‘intérêt de marquer la place que le Mystère de la Charité de Jeanne d’Arc occupe dans l’œuvre de l’écrivain. Rendons à M. Péguy cette justice qu’il a toujours poursuivi un idéal, mais quand il le cherche dans le mystère d’une âme de sainte, force est bien de reconnaître que cette poursuite, sincèrement conduite, l’a porté loin de son point de départ. Qu’il ait fait ce chemin guidé par notre Jeanne d’Arc, dont la vision, paraît-il, s’imposait déjà à son esprit quand il était à l’École normale, c’est un signe, entre plusieurs, de l’étonnante action que la sainte héroïne semble appelée, de nos jours, à exercer sur l’imagination et sur la conscience françaises. Sera-t-elle donc, une fois encore, notre libératrice, la libératrice de nos pensées, de notre art, comme elle a été jadis la libératrice de notre sol ?
M. Louis Bertrand, auquel l’Académie décerne le prix Née, n’est pas seulement un de nos romanciers les plus distingués ; il est, en outre, un brillant paysagiste, Lorrain d’origine, transplanté en Algérie, il a été conquis par le soleil du Midi, et — sauf son dernier livre où, en souvenir de ses origines, il fait revivre la société d’une petite ville des environs de Metz, — tout ce qu’il a écrit, romans ou impressions de voyage, nous transporte à Marseille, en Espagne, dans l’Afrique française, en Égypte, en Grèce, en Turquie, en Palestine. Aussi, quand il eut récemment l’idée de publier une sorte d’anthologie de son œuvre, put-il l’intituler : Le livre de la Méditerranée. Il dispose d’une palette à la fois très riche et très délicate pour reproduire le pittoresque des villes d’Orient et surtout pour peindre les enchantements de la lumière et de la couleur dans ces pays de soleil. Comme s’il cherchait à en ressentir une impression plus forte, plus violente, il se plaît parfois à les parcourir aux jours torrides de l’été. Qu’on puisse le louer sur ce sujet, en une Compagnie qui s’enorgueillit de posséder M. Pierre Loti, ce n’est pas lui reconnaître un mince mérite. M. Bertrand ne s’en tient pas à la peinture des choses extérieures. Faut-il faire revivre la plèbe cosmopolite qui grouille dans les quartiers ouvriers de Marseille, découvrir ce qui se cache, se transforme et se prépare sous ce qu’il a appelé le « Mirage oriental », son observation est des plus pénétrantes ; le paysagiste et le romancier se doublent alors d’un sociologue et d’un politique.
C’est encore à des romanciers que l’Académie attribue plusieurs des prix qu’elle décerne directement, le prix Narcisse Michaut à M. Paul Renaudin, le prix Kastner-Boursault à M. de Nion qui est, en outre, un critique dramatique estimé, le prix Lambert à M. de Larmandie, le dévoué délégué de la Société des gens de lettres, qui, dans une production très abondante et très variée, a fait une large part aux œuvres d’imagination, le prix Marmier à Mme Marie-Anne de Bovet. Ajoutez plusieurs autres romanciers récompensés dans le concours Montyon et dans les concours annexes, tels MM. Jacques des Cachons, Léo Byram, Fernand Aubier, Henri Davignon, André Fergan, Mme Jean Pommerol, Mlle Yvonne Durand.
Des romans, il est naturel de rapprocher la poésie. L’Académie s’était-elle montrée trop hardie ou trop pressée, en choisissant la Conquête de l’Air comme thème du concours de poésie pour l’année 1911 ? Pouvait-elle cependant offrir aux poètes une plus riche matière que cette audacieuse découverte et l’étonnante floraison d’héroïsme qu’elle a suscitée ? Le concours ne nous a pas donné tout ce que nous en attendions, et, entre tous les poèmes déposés, nous n’avons pu en distinguer qu’un auquel a été attribuée une fraction du prix. L’auteur de ce poème, d’un souffle généreux, s’est trouvé être un jeune officier de cavalerie, le lieutenant Rollin, déjà lauréat du précédent concours.
M. le ministre, en nous autorisant, gracieusement à employer en récompenses à des livres de vers, les 2 500 francs restés disponibles sur le prix du Budget, nous a mis à même d’ajouter cinq autres lauréats à ceux entre lesquels nous divisons les prix Archon-Despérouses, Davaine et Coppée. Parmi eux, l’Académie, toujours empressée à récompenser les écrivains qui cultivent la langue française hors de nos frontières, a particulièrement distingué un poète belge, M. Albert Giraud, auteur de la Guirlande des Dieux.
Si je signale ensuite les prix alloués à deux auteurs dramatiques, M. Zamacoïs et M. Gabriel Trarieux, j’en aurai fini avec la littérature d’imagination, dont, avec la modestie qui convient à un simple historien, je devais reconnaître la prééminence.
J’en viens maintenant à des œuvres d’un ordre plus austère, qui éveillent moins la curiosité du grand public, et dont, par cela même, l’Académie est d’autant plus tenue à signaler le mérite : livres d’histoire ou de critique littéraire, dans lesquels les auteurs ont souvent dépensé le travail acharné de plusieurs années, sans autre dessein ni profit que d’ajouter quelque chose aux connaissances de l’esprit humain, de faire plus de lumière sur certains faits ou sur certains écrivains. Parmi les récompenses destinées à ce genre de travaux, il en est une que son importance, son ancienneté et son renom placent hors ligne : c’est le prix Gobert, attribué, d’après la volonté de son fondateur, à un « morceau d’histoire de France ». L’Académie, à qui il ne déplaît pas de montrer, une fois de plus, quelle conception large elle se fait du domaine de l’histoire de France, décerne, cette année, le prix à M. Joseph Bédier pour les deux premiers volumes de son grand ouvrage : Les légendes épiques, recherches sur la formation des Chansons de Geste.
Lorsqu’il a commencé ses recherches, M. Bédier croc ait, sur la foi des maître, les plus illustres, que ces Chansons, composées aux XIe et XIIe siècles, n’étaient que les amplifications de cantilènes ou de récits, aujourd’hui disparus, dont les auteurs inconnus auraient été, contemporains de Charlemagne et des autres héros, en ces jours où, comme on l’a dit, « les guerriers se sentaient eux-mêmes personnages épiques et, d’avance, entendaient, dans la mêlée, la chanson insultante ou glorieuse que l’on ferait sur eux ». Or, en étudiant celle de ces chansons qui se rapportait à Guillaume d’Orange, comte de Toulouse, des doutes sont nés dans l’esprit de M. Bédier. Il constatait que l’abbaye où le guerrier, devenu moine, avait fini sa vie en odeur de sainteté, possédait, aux XIe et XIIe siècles, des relations latines de la vie du personnage, qui présentaient de nombreux rapports avec la chanson de geste. Entre les moines et les jongleurs, il y avait donc eu contact. Mais, comment ces derniers, hommes du Nord, s’étaient-ils trouvés en relation avec un monastère du midi de la France ? M. Bédier découvrit que d’autres églises ou monastères gardaient aussi des souvenirs de Guillaume. Repérant alors sur une carte ces divers sanctuaires et les reliant par une ligne continue, il constata que cette ligne coïncidait exactement avec l’ancienne voie romaine que décrit, vers 1150, le Guide des pèlerins de Saint Jacques de Galicie. Alors tout s’illumina à ses yeux. Par cette route, aux XIe et XIIe siècles, passaient des foules de pèlerins, entre lesquels des gens du Nord. Et, dans ces foules, voyageaient des jongleurs qui chantaient aux étapes. Ces pèlerins, animés de l’esprit des Croisades, se dirigeant vers une terre encore occupée en grande partie par les infidèles, étaient en état d’exaltation religieuse et guerrière. Et voici que, sur leur route, ils rencontraient, dans des sanctuaires, le souvenir et les reliques d’un personnage qui avait été jadis, contre les infidèles, « le saint athlète de Dieu ». Les moines contaient l’histoire et la légende, et les jongleurs trouvaient là matière à leurs chants.
Ainsi mis en goût, M. Bédier a fait le même travail sur d’autres cycles, il a « localisé » d’autres légendes, et il y a fait des constatations analogues. Partout, il a vu les voies romaines, devenues chemins de pèlerinage, traversant des sanctuaires hantés par le souvenir des héros, et partout aussi, la chanson de geste naissant, au passage, de la collaboration des moines et des jongleurs.
L’un des nôtres nous a trop mis en garde contre « le culte de l’incompétence », pour que je me hasarde à porter un jugement personnel sur la solution ainsi proposée à ce problème d’érudition médiévale qu’un savant allemand a déclaré être » parmi les plus obscurs de l’histoire littéraire ». Si M. Bédier paraît avoir démontré la relation existant entre les pèlerinages et la formation des poèmes, a-t-il établi d’une façon aussi certaine qu’il n’avait existé, antérieurement au XIe siècle, aucune poésie populaire dont les jongleurs eussent, pu se servir ? Questions débattues entre érudits, et dans lesquelles je n’ai pas la témérité d’intervenir. Mais ce que le puis louer, c’est l’étendue des informations, l’ingéniosité des aperçus, la probité des discussions, et surtout l’art si vivant avec lequel l’auteur nous fait assister à ses recherches et partager l’émotion de ses découvertes. Et d’ailleurs, à ne considérer les choses qu’au point de vue général des vraisemblances historiques, pourquoi s’étonnerait-on que ces poèmes fussent nés aux XIe et XIIe siècles ? Ce qui y vit, comme l’a fait remarquer le rapporteur de notre commission, qui est mieux qualifié que personne pour parler d’histoire de France, n’est-ce pas vraiment la France de ce temps, la France de la Chevalerie et des Croisades, avec son esprit d’aventure héroïque ? Ajouterai-je que je serais heureux d’avoir à constater une fois de plus la fécondité dont aurait fait preuve notre génie national, à une époque où il était vraiment initiateur dans tous les domaines de l’action, de la pensée et de l’art ? Il fut un temps où cette partie de nos annales était incomprise et dédaignée. La Renaissance avait tourné tous les regards vers l’antiquité ; les beaux esprits classiques, même les grands esprits, imaginaient que notre passé se cachait dans la nuit, dans la nuit du moyen âge. Grâce à Dieu, on s’est dégagé de ces vues courtes et fausses, et l’on ne compte plus les érudits, les historiens, les artistes qui, comme l’a fait M. Bédier dans son domaine, s’efforcent à exhumer de la poudre des archives ou des vestiges de nos monuments, les titres d’honneur de ces siècles, qui furent de grands siècles français.
Le second prix Gobert est attribué à M. Louis Batiffol, pour le nouveau volume qu’il vient d’ajouter à ses études sur le règne de Louis XIII. Cette fois, il nous donne un portrait en pied de Louis XIII à vingt ans. C’est l’époque où ce prince échappe à la tutelle de sa mère, et où il entend régner par lui-même ; trop jeune encore, il subit l’influence du favori Luynes. Toutefois, il nous apparaît fort différent du roi fainéant, secoué seulement de brèves colères ou de, fantaisies passagères, auquel les historiens et surtout les romanciers nous avaient habitués. Ce livre, plein de documents, illustré d’anecdotes, plaît aux lecteurs mondains par son agrément, et intéresse les érudits par la nouveauté et la fraîcheur des sources explorées.
Nombreux sont les autres ouvrages d’histoire ou de littérature entre lesquels nous avons partagé — en fractions souvent trop minimes à notre gré — les prix Bordin, Marcelin Guérin, Guizot, Thérouanne, Halphen ; on en pourrait compter près d’une trentaine. À peine ai-je le temps de m’arrêter un moment à ceux auxquels ont été attribuées les récompenses les plus importantes.
Telle est entre autres la série déjà longue des travaux que M. Victor Girard a consacrés à Pascal : édition populaire des Pensées, recherches érudites, leçons éloquentes professées à l’Université de. Fribourg, ces travaux, tour à tour vastes et minutieux, dont Brunetière avait suivi l’évolution avec faveur, témoignent de l’influence toujours active de Pascal, décrivent la ferveur particulière que cet homme unique inspire aujourd’hui à une foule de bons esprits. De l’histoire extérieure de Pascal, de sa biographie proprement dite, nous voudrions tout connaître, et malheureusement nous ne savons que fort peu de chose. On comprend donc l’espèce de fièvre avec laquelle M. Giraud et ses frères, les Pascalisants, se penchent, après Cousin, Feugère et Sainte-Beuve, sur, les vénérables registres de la Bibliothèque nationale, qui n’ont peut-être pas encore révélé les derniers de leurs secrets. Nous ne sommes pas moins désireux de connaître l’histoire posthume de Pascal, de ce Pascal que chaque génération nouvelle veut s’approprier, qu’elle moule fatalement sur elle-même en prétendant se mouler sur lui. Ainsi se livre, autour de Pascal, comme autour de quelques autres figures, un conflit pathétique entre notre curiosité, qui cherche à ressusciter jusqu’aux moindres détails du passé, et l’instinct plus profond, plus bienfaisant, qui ne veut voir dans les grands hommes d’autrefois que les confidents fraternels et, pour ainsi parler, prophétiques de nos âmes d’aujourd’hui. À ces deux ordres de préoccupation, répondent les travaux de M. Victor Giraud. Par la sûreté de la méthode, la tenue du style et la fermeté de la pensée, M. Giraud justifie les espérances que, dès son début dans les lettres, il avait fait concevoir aux juges les plus difficiles.
C’est aussi une vaste et très consciencieuse étude de critique morale et littéraire que la thèse de M. Gaiffe sur le Drame en France au XVIIIe siècle. De quel courage l’auteur n’a-t-il pas dû s’armer pour mener à fin cette enquête qui a porté sur plus de trois cents drames imprimés ou manuscrits ! « Hortense ou le mari comme il y en peu » ; « L’homme et la femme comme il n’y en a point » ; « Le nègre comme il y a peu de blancs », le seul titre de ces drames innombrables nous remplit d’effroi. Quelle époque, juste ciel ! Vit-on jamais couler tant de larmes au parterre, et tant de vertus se pavaner sur la scène ? Car la grande affaire était alors de moraliser. C’est par là, d’ailleurs, que ces dramaturges nous intéressent. Leur œuvre, saut quelques exceptions, est la platitude même ; ils ne nous donnent, de la société de leur temps, qu’une image très insuffisante ; mais ils poursuivent, étendent, les attirer, leur donnant une direction sûre, une impulsion forte et féconde. En cela, il s’est affirmé l’un des maîtres de cette science géographique aujourd’hui si merveilleusement élargie, vivifiée, et sans presque aucune ressemblance avec ce qu’on nous enseignait, sous ce vocable, au temps de ma jeunesse.
M. Émile Collas, dans un livre fort agréable et soigneusement documenté, évoque la charmante figure et l’histoire tragique de Valentine de Milan, femme de Louis d’Orléans, frère de Charles VI, et mère d’un de nos premiers poètes, Charles d’Orléans.
De ces ouvrages, il convient de rapprocher un livre présenté au concours Montyon et dont le sujet était pour nous intéresser tout particulièrement : c’est celui de M. Gustave Macon sur Chantilly et le musée de Condé, excellente monographie comme seul pouvait la faire un homme qui connaissait à fond les archives du domaine et qui avait été témoin de sa reconstitution.
Obligé de passer sous silence tant d’autres travaux distingués sur l’histoire ou la littérature, je voudrais cependant noter, comme un symptôme curieux, le nombre croissant des ouvrages qui traitent des lettres étrangères, particulièrement des lettres anglaises. « Vous avez traversé notre vie et notre littérature, écrivait Sainte-Beuve à Mathew Arnold, par une ligne intérieure, profonde, qui fait les initiés. » De l’autre côté de la Manche, les meilleurs critiques, M. Andrew Lang, par exemple, renvoient cet éloge à l’un des professeurs de notre moderne Sorbonne, M. Émile Legouis, dont nous couronnons le livre sur Chaucer ; les Méthodistes reconnaissent l’originalité et la richesse du livre de M. Augustin Leger, un autre de nos lauréats, sur la Jeunesse de Wesley, et l’Université d’Oxford appelle M. Koszul, dont nous avons distingué la thèse sur la Jeunesse de Shelley, à collaborer à l’édition des œuvres de ce poète. Il y a là un fait nouveau et digne de remarque. Certes, les études anglaises ont eu de tous temps des adeptes parmi nous, et l’Angleterre a toujours suivi avec une attention, malicieuse parfois, mais très éveillée, ce que disaient d’elle les Taine, les Montégut, tant d’autres encore, sans oublier l’insigne vétéran des études shakespeariennes que nous nous honorons de compter parmi les doyens de notre Compagnie. Mais ce qu’il y a de particulier dans le cas des auteurs dont je viens de parler, c’est que la critique anglaise ne les distingue plus de ses propres représentants. À cette occasion, me sera-t-il permis de rendre hommage à l’écrivain de rare talent, au noble poète, dont la thèse mémorable sur Burns a donné le branle et servi de modèle à cette jeunesse conquérante. La place d’Auguste Angellier, s’il eût vécu, devait être un jour, au jugement de plusieurs, non parmi ceux qui reçoivent des couronnes académiques, mais parmi ceux qui les donnent, et alors avec quelle verve vigoureuse, pittoresque et cordiale, il eût fait valoir les titres de MM. Legouis, Koszul et Leger aux faveurs de l’Académie !
Le prix Saintour, en nous faisant pénétrer quelque peu et pour un instant dans ce domaine de l’érudition qui d’ordinaire n’est pas le nôtre, me sera une occasion, si vous le voulez bien, de dire un mot d’une querelle qui, depuis quelque temps, passionne une partie de l’opinion ; je veux parler de ce qu’on a appelé la question des fiches. Entendons-nous, car ce mot de fiche a deux sens et, dans les deux, il a fait beaucoup de bruit. Ici nous ne nous occupons pas de politique, et il ne s’agit que des fiches préparatoires aux travaux historiques et littéraires, presque aussi fameuses et discutées que les autres, et dont le nom semble être devenu la caractéristique d’une méthode, la devise d’une école.
Écartons d’abord une confusion qui risque de fausser le débat. Les droits, la nécessité de l’érudition ne sont pas en cause. Personne, que je sache, ne songe à réhabiliter la méthode ultra confortable des « sièges faits » de Vertot. Nous tenons ici que l’histoire est un art ; mais, à nourrir cet art, à le féconder, les plus minutieuses, les plus rigoureuses disciplines scientifiques doivent concourir. Nous ne reprocherons jamais à un écrivain d’avoir consulté trop de documents. On n’en consulte, on n’en publie jamais assez. Hisser le pavillon germanique sur tous nos dépôts d’archives, sur toutes nos publications documentaires, sur toute œuvre d’histoire qui pousse jusqu’au scrupule le souci de l’exactitude, autant dire que les Mabillon, les Tillemont, les Fustel de Coulanges ne comptent pas parmi les représentants authentiques de la science française. Non, je le répète, l’érudition n’est pas en cause, et nous ne saurions marquer trop de reconnaissance aux travailleurs acharnés qui fouillent nos bibliothèques publiques ou privées, exhumant chaque jour de nouvelles pièces dont aucune, si chétive qu’elle paraisse, n’est sans intérêt.
M. l’abbé Griselle, auquel l’Académie attribue la fraction la plus importante du prix Saintour, est précisément au premier rang de ces travailleurs. Nul ne s’est laissé prendre, autant que lui, à la fascination du document. Il aime d’amour ce contact direct avec le passé, cette chasse aux mille surprises. Un beau matin, il se met en tête de dénicher les lettres autographes de Louis XIII ; un hasard lui en a fait trouver quelques-unes ; il aura les autres. Chemin faisant, il rencontre une page perdue de Balzac, un billet de Richelieu ; il note ces pistes nouvelles, ramasse le butin et revient à Louis XIII. Puis l’envie le prend d’aller fureter dans les papiers de Colbert ; d’autres ont déjà passé par cette forêt, et souvent quelque devancier aura écrit, sur une des mille liasses, ces mots décourageants : « Rien à prendre. » Raison de plus pour se plonger dans le carton méprisé. Ainsi pensent du moins les vrais chasseurs, et, le plus souvent, l’événement leur donne raison. À ce jeu, les copies s’entassent. Serviable aux autres chercheurs, M. Griselle ne sait plus où publier ses inédits ; alors il fonde une revue : Documents d’histoire, dans laquelle il verse, au jour le jour, les plus précieuses de ses découvertes. A d’autres d’utiliser, d’interpréter ces documents, d’y trouver les matériaux d’un livre d’histoire. Ce livre, ces livres, M. Griselle voudrait bien les écrire tous, et sa thèse sur Bourdaloue montre ce qu’il saurait faire en ce genre, mais, pour l’instant, la chasse le tient.
Oh ! Messieurs, combien de faiseurs de livres, de compilateurs de thèses, nous voudrions voir s’éclairer de cet exemple désintéressé et en comprendre la leçon ! On a trouvé quelque inédit, on a bâti une bibliographie monumentale, on a collectionné des fiches sans nombre, on cimente vaille que vaille ces matériaux informes, on leur donne un titre plein de promesses, et on croit avoir fait un livre. Non, il reste à faire. Si l’ambition qui soulève les vrais artistes, si l’intuition divinatrice qui l’ait les vrais historiens vous manquent, si vous ne sentez en vous ni le goût ni la force de maîtriser, d’ordonner, d’illuminer vos notules infinies, contentez-vous donc d’une besogne modeste, mais utile : publiez vos documents ou vos bibliographies, laissez à d’autres le soin d’utiliser cette matière et n’encombrez pas nos bibliothèques de ces œuvres massives, amorphes, inertes qui ne sont, à proprement parler, ni de l’érudition ni de l’histoire. Vous savez comme moi, Messieurs, qu’en parlant de la sorte, je ne m’irrite pas contre un fantôme. Combien de fois, attirés par un beau titre, ne nous sommes-nous pas engagés avec allégresse dans la lecture de quelque livre envoyé à nos concours, et combien de fois, au bout de vingt pages chaotiques, le livre ne nous est-il pas tombé des mains ! Victime d’une méthode ardue et vaine, l’auteur avait lu tout ce qui, de près ou de loin, se rapportait à son sujet ; journaux contemporains, brochures de néant, et que sais-je encore ? il avait tout dépouillé, annoté. Étourdi, désorienté au milieu de cette poussière innombrable, sans lumière, sans joie, il avait creusé jusqu’au bout son morne et stérile sillon. Ah ! certes, à raison du mal qu’il s’est donné, nous lui pardonnerions de nous avoir fatigués sans mesure ; mais nous ne lui pardonnons pas, à lui et à ses pareils, le funeste exemple qu’ils donnent, la proscription que, sans le vouloir, sans le savoir, insensiblement, ils établissent, non pas seulement contre notre goût français, mais contre l’histoire elle-même. Aussi, à tous ces parasites de la science, notre plaisir est-il grand d’opposer, non seulement nos maîtres d’autrefois et ceux d’aujourd’hui qui nous touchent de trop près pour que je puisse les nommer ici, mais la belle équipe de jeunes travailleurs parmi lesquels nous aimons à recruter nos lauréats, qui, sans négliger l’érudition, ne méprisent pas ce que certains impuissants appellent ironiquement « l’esprit littéraire » et qui n’ont aucune raison personnelle de croire à la faillite de l’intelligence.
Le concours Fabien réservé aux travaux d’économie sociale eût été, ce semble, jugé avec plus de compétence par une Académie voisine. Nous ne nous en efforçons pas moins d’accomplir de notre mieux la tâche que nous impose cette fondation et nous récompensons, cette année, sept auteurs dont nous avons apprécié l’effort consciencieux et l’inspiration élevée, MM. Boissard, Cormouls Houlès, de Meurville, Ricard, Roux et de Fontenouille, Soleil et Bonnefoy, Weber. Mais, pour ce concours, plus encore que pour les autres, nous tenons à noter que l’Académie n’entend pas contresigner toutes les conclusions sociologiques des auteurs.
Sur le prix Juteau-Duvigneaux réservé aux ouvrages écrits « au point de vue catholique », nous avons récompensé des travaux d’ordre divers, biographies, histoires, recherches théologiques, comme le très savant livre de M. l’abbé Lebreton sur les Origines du dogme de la Trinité livre d’une forme distinguée et dont la méthode très distinguée sûre, l’érudition abondante et sereine nous ramènent aux beaux temps des Petau et des Thomassin. La fraction la plus importante du prix est attribuée à M. l’abbé Bremond, déjà deux fois lauréat de l’Académie, pour une nouvelle série des études qu’il a réunies sous ce titre. L’Inquiétude religieuse. Prêtre, théologien et moraliste, en même temps qu’excellent lettré, nul n’était mieux préparé que M. Bremond à la science délicate et émouvante de la psychologie religieuse. Sur la crise d’un Pascal, sur la détresse d’un Lamennais, sur la mystique d’un Fénelon, sur le génie complexe d’un Newman, sur la conversion d’un Huysmans, comme sur la « religion » de George Eliot ou de quelques belles âmes de l’Anglicanisme, il nous a donné des études déliées et profondes qui font songer à la maîtrise d’un Sainte-Beuve. Tant qu’il n’a pas la clef d’une âme, il ne se lasse pas de fouiller plus avant ; pas un geste, pas un mot, pas une démarche du personnage qui ne doive être éclairé jusqu’au fond ; tous les sentiers de l’esprit, tous les détours du cœur sont explorés, toutes les pistes relevées, tous les indices interrogés, jusqu’à ce qu’enfin il tienne l’homme. Et, sans doute, cela le conduit parfois à des analyses un peu subtiles, même à d’apparents paradoxes, mais plus souvent à d’admirables et vivants portraits qui nous semblent neufs à force d’être plus vrais que ceux qu’on nous avait présentés jusqu’ici. Tout cela, d’une allure souple et charmante, d’un tour alerte et souvent imprévu, trahissant le plaisir que l’auteur prend à ses recherches et à ses découvertes. Du reste parfaitement sérieux, alors même qu’il paraît s’amuser ; de la désinvolture dans la plume et de la sagesse dans l’esprit, et aussi beaucoup de charité dans le cœur. C’est, en effet, de préférence vers les âmes troublées et inquiètes qu’une sympathie naturelle conduit M. Bremond. Il se penche sur les abîmes que le doute ou « l’inquiétude religieuse » creusent dans les consciences. « L’horreur instinctive que causait autrefois la rencontre de l’hérétique ou du révolté, écrit-il, a fait place, chez beaucoup, à une pitié patiente et tendre qui, sans pactiser avec l’erreur, voudrait sauver les errants en dépit d’eux-mêmes. » Tout en se proclamant « très obstinément décidé à ne jamais accueillir le moindre doute sur les dogmes de l’Église », il se croit autorisé à chercher l’âme de vérité éparse ailleurs. Ce sentiment donne à son œuvre, par d’autres côtés d’une vivacité si piquante, quelque chose d’ému, d’anxieux et de profond.
Il faut m’arrêter, avec le regret, comme il m’arrive tous les ans, de laisser de côté beaucoup d’autres livres que j’eusse aimé à vous signaler, de me taire sur beaucoup d’écrivains de mérite qui auront probablement quelque peine à me pardonner mon silence. Du moins, ne finirai-je pas sans dire un mot d’une littérature spéciale à laquelle l’Académie fait toujours volontiers large part ; je veux parler des livres dans lesquels les explorateurs ou les combattants de nos expéditions africaines et asiatiques racontent leurs efforts, leurs épreuves et leurs succès. Parfois c’est un inconnu, comme ce Silbermann, engagé de la Légion étrangère, demeuré simple soldat après quinze ans de campagnes au Dahomey, à Madagascar ou en Cochinchine, dont les récits, sans art, mais absolument sincères, sont le meilleur témoignage à opposer aux calomnies intéressées qu’on a dirigées contre l’admirable Légion et contre ses chefs. D’autres livres sont signés de noms tout illuminés de la gloire africaine, tels le colonel Gouraud et le lieutenant-colonel Mangin, lauréats du concours Montyon, qui nous apportent, l’un le Journal de la mémorable expédition par laquelle il a pacifié la Mauritanie, l’autre ce livre sur la Force noire qui a en un si grand retentissement dans le monde militaire ; tel aussi le colonel Baratier auquel l’Académie décerne l’un de ses prix directs les plus recherchés, le prix Vitet. Quel que soit leur mérite littéraire, — et certes rien de plus vivant, de plus dramatique, de plus poignant que la traversée du grand marais africain racontée par le colonel Baratier, — ces livres ont pour nous un intérêt d’un ordre encore supérieur. Nous y voyons à l’œuvre ces qualités d’énergie héroïque, d’endurance surhumaine, de patriotique abnégation, unies à tant de souplesse diplomatique, de don de gouvernement, de maîtrise des hommes, de divination de la psychologie indigène, qui ont permis à ces officiers, plus contrecarrés que secondés, d’accomplir, avec de si faibles moyens, une si grande œuvre. Ce sont autant de fragments de cette épopée coloniale qui, au lendemain de nos revers, a ranimé notre foi dans les destinées de la France, et dont, à certaines heures, la vision nous élève au-dessus des banalités de notre civilisation trop monotone et trop confortable, des mesquines bassesses de notre politique.
Aussi remercions-nous ceux des acteurs de cette épopée qui, se rappelant, sur la foi d’illustres exemples, que les mains qui ont manié l’épée peuvent aussi tenir la plume, nous fournissent l’occasion de payer une petite part de la dette qu’a contractée envers eux la France.
[1] Victor-Marie, comte Hugo, P. 166.