Hommage prononcé à l’occasion du décès de M. Michel Mohrt, en l’église Saint-Germain-des-Prés

Le 24 novembre 2011

Jean d’ORMESSON

Hommage à M. Michel Mohrt*

 

 

Michel Mohrt était un écrivain français et un marin breton, fidèle et plutôt sauvage. De Mon royaume pour un cheval, des Nomades, de La Campagne d’Italie, de La Prison maritime aux Deux Indiennes à Paris, à La Maison du père, au Tombeau de la Rouërie, il a écrit des livres qui lui ont valu beaucoup d’admirateurs et d’amis qui l’aimaient souvent passionnément, et dont quelques-uns seulement sont réunis ici ce soir pour célébrer sa mémoire.

Durant des années, à quelques mètres d’ici, dans la rue Sébastien-Bottin devenue il y a peu la rue Gaston-Gallimard, il a fréquenté, traduit, fait connaître les plus grands noms de la littérature américaine contemporaine : Robert Penn Warren, William Styron, Philippe Roth, Hemingway ou Faulkner qu’il décrit, dans une formule devenue célèbre, sous les traits d’un pianiste de bar qui se retournerait tout à coup sur son tabouret pour vous tirer dessus avec son pistolet.

Il avait beaucoup talent. Il aimait peindre des coins de Bretagne, de Corse, de Venise. Souvent Françoise l’accompagnait et c’était un bonheur de les voir tous les deux. Il chantait très bien. Des romances populaires, des cantiques et surtout des chants de marins.
Jusqu’à un âge avancé, il se tenait très droit, un peu raide, l’air britannique sous sa moustache, avec l’élégance la plus simple et sans aucune affectation. Il lui arrivait de se tromper, comme tout le monde, mais il était incapable de la moindre bassesse. Il aimait l’amitié et l’amour, et nous étions nombreux à l’aimer. J’ose espérer que, dans cette Maison du Père où il est enfin entré, sa foi qui était si ferme et son charme qui était si grand auront trouvé leur récompense.

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* décédé le 17 août 2011.