Discours sur les prix littéraires et l’état de la langue 1986

Le 18 décembre 1986

Maurice DRUON

Messieurs,

Une institution comme la nôtre n’a pu et ne peut durer qu’en unissant le maintien des permanences et l’acclimatation aux particularités du temps.

La devise de ceux auxquels, au long de trois cent cinquante ans, la Compagnie a bien voulu confier une secrétairerie que le grand Cardinal décréta perpétuelle pourrait être, et paraît effectivement avoir été : « Pas de changement dans la liturgie, mais une constante adaptation de la pastorale. »

La galerie de mes vingt-neuf prédécesseurs, de Valentin Conrart, qui battit tous les records de silence et de durée — quarante-trois ans —, à Jean Mistler, présent et à qui je veux rendre hommage, offre, je dois le reconnaître, une belle variété de modèles et de tempéraments, où apparaît, presque au centre, l’encyclopédique, vivace et généreux d’Alembert.

Ma charge en ce jour comporte de vous présenter ce qui, de Raynouard à Georges Duhamel, s’appela le Rapport sur les concours, et s’intitule, depuis Georges Lecomte, le Discours sur les prix littéraires ; à quoi j’ajouterai, m’inspirant de Maurice Genevoix, un bref rapport sur l’état de la langue.

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Un nouveau Grand Prix apparaît en tête de notre palmarès : celui de la Francophonie. Voilà bien le signe de l’adaptation.

L’an dernier, M. le Président de la République, dans l’adresse qu’il nous fit, souhaitait que l’Académie fût « associée très étroitement » aux rencontres décidées et actions entreprises pour la défense de la langue et la communauté des peuples qui l’utilisent. « Je saisis l’Académie française », nous a-t-il dit. M. François Mitterrand connait le sens des mots ; nous le connaissons aussi. Dans cette acception, saisir signifie porter devant une juridiction. Nous avons bien entendu le propos.

 

Nous avons constitué, en notre sein, une commission de la francophonie pour suivre ces questions, et n’avons ménagé ni nos peines ni nos initiatives, que la presse, française et internationale, a très attentivement relatées.

Et puis le destin nous a aidés, si la générosité internationale peut s’appeler destin.

Le gouvernement canadien, fort bien secondé par ses diplomates, a offert à l’Académie française — ce qui était bien également la reconnaître comme juridiction morale — &ouvrir un fonds destiné à l’attribution d’un grand prix parmi tous les auteurs francophones.

À l’issue de la « Conférence des pays ayant en commun l’usage du français », en février, le Premier ministre du Canada, le Très Honorable Brian Mulroney, reçu en notre séance ordinaire, ce qui en vérité est un fait extraordinaire, vint nous apporter une dotation initiale de quatre cent mille dollars. En octobre, deux groupes privés canadiens ont augmenté de moitié ce capital. En novembre, sur décision de M. le ministre de l’Économie et des Finances, le gouvernement de la France a mis dans cette corbeille francophone un million de francs. L’exemple sera suivi, nous le pensons.

Désirant que le prix puisse être décerné dès cette année, l’Académie a résolu d’en fournir le premier montant sur ses fonds propres.

Ainsi avons-nous pu, par un vote quasi unanime, décerner ce laurier nouveau à M. Georges Schehadé. Je ne puis mieux faire, pour rendre publiques les raisons de notre choix, que de vous communiquer le rapport de notre confrère, M. Jacques de Bourbon Busses :

« Georges Schehadé, Libanais, citoyen de ce pays ami et crucifié, est un des grands poètes français du siècle. Écoutons les augures. Dès 1938,
Éluard, après avoir lu ses premiers poèmes, lui écrit : “Vos poésies me rapportent une vue profonde, un chant juste que j’oubliais. Votre livre me fait un bien que vous ne pouvez évaluer.”

« Plus tard, en 195 3, Saint-John Perse, pourtant avare de compliments, écrit : « Poète, qui l’est plus ? Poète, qui l’est mieux ? Écoutez Schehadé vous parler du réel.

« La même année André Breton parraine sa première pièce, Monsieur Bob’le, qui sera suivie de la Soirée des proverbes, d’Histoire de Vasco, du Voyage, de l’Émigré de Brisbane, représenté en 1968 à la Comédie-Française, les pièces précédentes ayant été, plusieurs fois, montées par la Compagnie Jean-Louis Barrault. Ces pièces ont été jouées dans le monde entier et sont traduites en une vingtaine de langues.

« Elles sont dans la ligne de sa poésie, qui est un désordre gouverné, où l’initiative est laissée aux mots, mais non sans qu’existe une charpente cachée, comme dans tout grand art. Son dernier recueil, le Nageur d’un seul amour, l’atteste avec éclat, et vérifie cette phrase qui est de lui : “Il n’y a pas de grande vérité qui ne soit une vérité de poésie.” Le métier de Georges Schehadé a été, pendant un quart de siècle, de servir la langue et la culture françaises au Liban, comme professeur et comme conseiller artistique de notre ambassade. Il a fait mieux puisque, comme écrivain français, il a gagné à notre langue de nombreux et fervents amis.

« Il y a eu un coup de foudre entre Georges Schehadé et la langue française, et ce coup de foudre dure encore. Tout enfant il était tombé en arrêt devant le mot azur, et ce mot mallarméen l’avait enchanté pendant des jours. Quand on aime une langue à ce point, il n’est pas étonnant qu’on en tire des effets inédits et une musique différente de toutes les autres. C’est ce qui est arrivé à Georges Schehadé, serviteur et maître de la langue française.

Maîtrise de la langue, service de la langue ; n’est-ce pas là, formulé de la façon la plus exacte et la plus concise, l’objet même de notre prix ?

Puisse l’hommage que nous vous rendons, Georges Schehadé, retentir, à travers les continents et les océans, dans l’ensemble du monde francophone.

Le règlement de notre prix spécifie que celui-ci peut aussi bien couronner des travaux accomplis dans le domaine des sciences, de la technologie, de l’informatique même qui auront contribué remarquablement à la vitalité de la langue française, à sa présence, à son enrichissement.

 

C’est pourquoi l’Académie a décerné une grande médaille de la Francophonie aux professeurs Martial Bourassa, canadien, et Jean-Paul Cachera, français, pour leur traité : La Maladie coronaire. Écoutons le jugement porté sur cet ouvrage par le professeur Jean Bernard, qui nous en a fait rapport :

« La situation de la francophonie est assurément favorable dans les domaines de la littérature, de l’art, mais elle reste très peu satisfaisante en science et est particulièrement grave en biologie et en médecine. Il faut donc souligner l’importance du travail commun accompli par les équipes française et québécoise dans le domaine de la cardiologie. L’objet très important est l’amélioration de nos connaissances concernant la maladie coronaire et en conséquence l’amélioration de son traitement. La maladie coronaire demeure en effet la première cause de mortalité des pays développés, responsable de près de cinquante pour cent des décès de la population.

« Les progrès accomplis au cours des dernières décennies permettent de sérieux espoirs. La coopération organisée entre Jean-Paul Cachera et Martial Bourassa a valeur de modèle. Elle unit les équipes de cardiologues et chirurgiens francophones. Les tendances des médecines nord-américaines et européennes, avec leurs légères variations, y sont représentées.

« En dépit des affirmations pessimistes de certains observateurs, un vigoureux effort dans le domaine de la francophonie, à un très haut niveau scientifique, peut donner de remarquables résultats. »

C’est un tel résultat que l’Académie a voulu signaler et honorer.

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Le prix qu’institua notre confrère Paul Morand en faisant l’Académie sa légataire, prix biennal qui alterne désormais avec le Grand Prix de Littérature, et qui couronne la totalité d’une œuvre, est allé, cette année, à M. Jean Orieux.

L’état de sa santé empêche M. Orieux d’être présent à notre cérémonie. Au moins l’imprimé lui portera l’écho de nos louanges.

 

Cet écrivain de haute qualité qui, depuis qu’a pris fin sa carrière d’enseignant, vit retiré dans son Aquitaine natale, loin du siècle et de ses rumeurs, a été distingué par l’Académie dès 1946 pour son premier roman, Fontagre. Huit autres ont suivi en l’espace de dix ans. Puis il a quitté la voie romanesque pour celle de la biographie qui demande autant d’imagination, avec moins de liberté, puisqu’il s’agit non plus de créer des personnages qui seront, mais de récréer des personnages qui furent. Il faut d’abord se faire la mémoire d’un autre. Orieux s’enferme cinq ou six ans avec chacun de ses héros, jusqu’à pouvoir presque dialoguer avec eux et entendre leurs réponses aux questions que nous voudrions leur poser. Ainsi a-t-il rapproché de nous, comme s’ils se mettaient à vivre, parler, marcher dans notre bibliothèque ou notre salon, Bussy-Rabutin, puis Voltaire, puis Talleyrand, puis La Fontaine, et enfin cette année Catherine de Médicis. Ce sont là des ouvrages qui ne passeront pas car ils sont le fruit d’un esprit à la fois sceptique et passionné, ce qui procure au lecteur l’agrément de pouvoir aimer sans être dupe.

Les poèmes de Jean Orieux ont été recueillis sous un beau titre L’Étoile et le Chaos ; et c’est un poète aussi qui a écrit Les Figues de Berbérie, livre de souvenirs et d’émerveillement, consacré au Maroc, à ses paysages, à ses cités, à ses traditions, à ses séductions.

Nous avons ainsi voulu couronner en M. Orieux un écrivain qui a excellé en presque tous les genres littéraires.

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Le Grand Prix du Rayonnement de la langue française connaît plusieurs attributaires ; les mérites étaient nombreux.

Tout d’abord, la grande médaille de vermeil est remise à M. Béla Köpeczi, ministre de la Culture et de l’Éducation de Hongrie.

Né trois ans après la fin de la Première Guerre mondiale, le professeur Köpeczi a fait ses études universitaires, études de littérature, d’histoire et de philologie romane à Budapest et à Paris. Il a été élève du collège Eôtvos, à Budapest, et de l’École normale supérieure, à Paris. Il est docteur ès lettres, à Budapest et à Paris. Il est membre, depuis 1976, de l’Académie des sciences de Hongrie. Il fut président de la Commission de coordination pour les sciences sociales et humaines, en son pays, au gouvernement duquel il appartient depuis 1982.

 

Cet érudit, ce chercheur, cet enseignant, ce politique, cet écrivain, qui a publié d’excellentes anthologies, et qui s’est penché avec beaucoup d’attention sur un certain nombre d’ismes contemporains, l’existentialisme, le structuralisme, le réalisme, le gauchisme, a consacré la plus grande partie de son œuvre à l’histoire, et tout spécialement à l’histoire des relations entre la Hongrie et la France. Rien ne lui est étranger de ce qui, depuis le temps des rois d’Anjou et de Clémence de Hongrie, reine de France, a pu tisser et constituer les liens entre les deux pays. Il n’est pour s’en convaincre que de consulter tels de ses ouvrages qui s’intitulent : La France et la Hongrie au début du XVIIIe siècle ; Hongrois et Français de Louis XI V à la Révolution française ; je dis bien consulter, ce que chacun de nous peut faire, et pas en traduction, car M. Köpeczi a rédigé ceux-là directement en français, ce qui méritait bien d’être souligné.

Il existe en Hongrie une longue tradition d’intérêt pour notre culture, intérêt fondé sur des affinités subtiles. Si cette tradition se poursuit, c’est bien à des hommes de savoir et de talent comme le professeur Köpeczi qu’on le doit, comme on lui doit l’ouverture de trois collèges bilingues où les enseignements généraux sont dispensés en hongrois et en français.

Il se trouve que l’hommage que nous lui rendons se rencontre avec l’ouverture de l’Institut hongrois de Paris, qu’il a inauguré avant-hier. Coïncidence non préméditée, mais que je ne puis regarder comme tout à fait fortuite.

Deux physiciens du Centre européen de recherche nucléaire, plus généralement connu sous l’abréviation de CERN, MM. Jacques Prentki et Charles Peyrou, reçoivent chacun un prix du Rayonnement de la langue.

Que viennent faire le CERN et ses chercheurs en notre palmarès ? Ne relèvent-ils pas plutôt de l’Académie des sciences ?

Écoutons ce que nous en a dit M. le professeur Leprince-Ringuet qui appartient aux deux Compagnies :

 

« Jacques Prentki, d’origine polonaise, naturalisé français, est un physicien qui dirige la division théorique du Centre européen pour la recherche nucléaire. Il a été nommé professeur au Collège de France en 1964 à une chaire nouvelle : " physique théorique des particules fondamentales

« Charles Peyrou, né en 1917, ingénieur des manufactures de l’État à sa sortie de l’École polytechnique, fut successivement sous-directeur de laboratoire de l’École polytechnique (rayons cosmiques et particules fondamentales), professeur à l’université de Berne et physicien au CERN où il dirige la division des chambres à traces (c’est-à-dire toute la partie détection et photographie des traces des particules).

« Ces deux physiciens, le théoricien et l’expérimentateur, ont joué ensemble un rôle considérable dans ce grand centre de recherches, le plus grand d’Europe, où se côtoient non seulement les scientifiques européens, mais ceux venus d’Amérique, des pays de l’Est, de l’Extrême-Orient. Par leur compétence, leur chaleur humaine, leur autorité, leur très large culture — exceptionnelle en fait — ils ont, pendant plusieurs décennies, jour après jour, servi le rayonnement français de la façon la plus profonde. Le CERN est un des très rares centres de recherches internationaux où le français et l’anglais sont les deux langues principales utilisées couramment. C’est en grande partie grâce à eux que la France a pu conserver et étendre ce privilège. »

L’Académie les en remercie.

Enfin, deux médailles d’argent, toujours au titre du Rayonnement, sont décernées, l’une à la nouvelle édition du dictionnaire le Grand Robert, excellent ouvrage de lexicographie moderne auquel nous ne manquons pas d’avoir recours pour nos propres travaux et qui mérite vraiment d’être distingué ; l’autre aux éditions des Incunables pour la publication de la Bible de Gutenberg, qui reproduit à la perfection l’exemplaire de la bibliothèque Mazarine et constitue, dans la librairie, au sens ancien du terme, un travail exceptionnel.

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C’est à M. Henri Thomas que va notre Grand Prix de Poésie. Voici ce qu’en écrit M. Jean Dutourd :

 

« Henri Thomas est l’un des plus grands et des plus profonds poètes de maintenant. Jünger a écrit sur lui dans son Journal : " Ce qui frappe chez Thomas, c’est cet amalgame de jeunesse et de noblesse dans la pauvreté qui, allié à une claire intelligence, donne au jugement quelque chose d’incorruptible. " C’est une bonne définition de sa poésie, qui est noble et jeune, comme celle de Baudelaire ou de Nerval, et incorruptible dans la mesure où elle ne se laisse jamais aller à l’ésotérisme facile. Gide, Supervielle, Paulhan admiraient Thomas. L’Académie française lui devait son Grand Prix de Poésie depuis vingt ou trente ans. »

On ne saurait mieux dire. Mais examinant notre palmarès de poésie, M. Dutourd, s’arrêtant sur le prix d’Académie décerné à M. Louis Amade, a tenu à ajouter à son rapport :

« Louis Amade est un remarquable poète, lui aussi, et qu’on ne connaît guère parce qu’il s’est trop longtemps — et trop modestement — caché derrière des chansons. Mais il a sa musique personnelle où il y a à la fois le soleil et la mélancolie méridionales. C’est toujours émouvant, et fort parfois. »

Signalons encore la médaille de vermeil décernée à M. Bernard Chenot pour son recueil Morgane par lequel il nous prouve qu’on peut être un haut serviteur de l’État, comme ministre et vice-président du Conseil d’État, un haut serviteur de l’Institut de France, comme secrétaire perpétuel de l’Académie des Sciences morales et politiques, et se garder quand même le temps et l’âme de servir aussi la poésie.

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Avoir à rendre compte du Grand Prix du Roman me rajeunit quelque peu. Je me rappelle en effet avoir rempli cet office, voici seize ans, lorsque ce prix couronna M. Poirot-Delpech qui vient de prendre possession du « benjaminat » de notre Compagnie, et qui sera reçu solennellement ici même à la fin de janvier.

En l’attribuant cette année à M. Pierre-Jean Rémy, je confesse que nous ne nous sommes pas trop hâtés. Depuis Le Sac du Palais d’été qui le révéla en 1971 et que nous aurions pu fort bien couronner, Pierre-Jean Rémy n’a pas publié moins de trente ouvrages, biographies, essais, récits, fantaisies, romans, romans, romans. Deux volumes en moyenne chaque année. Est-ce cette abondance qui, bien que son nom fût régulièrement cité, nous a un peu effarouchés, ou bien au contraire nous a-t-elle donné l’assurance confortable que nous aurions toujours un autre Pierre-jean Rémy à nous mettre sous la dent, l’an prochain ?

 

Une ville immortelle est un beau livre et de belle écriture, de haute culture aussi, qui envoûte et enchante. Pierre-Jean Rémy est un classique exubérant, ce qui rajeunit le classicisme. Son intrigue là n’est que le support qui rend vivante l’allégorie, ou plutôt la rend mortelle. Dans une ville-musée, symbole de la vieille civilisation méditerranéenne et centre-européenne, dans une société-musée, symbolique également, toute obnubilée de sa propre perpétuation et qui pour cela peut aller jusqu’au crime rituel, dans ce monde hors du monde, un homme, nel mezzo del camin de nostra vita, est accueilli, reçu, fêté, puis insensiblement repoussé, rejeté à sa solitude, et finit par se supprimer.

Dans tout suicide du protagoniste d’un roman, on peut se demander s’il n’y a pas, chez l’auteur, un constat d’achèvement d’un temps de son existence.

Cette Ville immortelle, dont le ciel, le sol, les murs de marbre reflètent si bien les saisons et les passions, cette ville est pleine de miroirs ornés, mais terribles, car ils obligent à se répondre à soi-même.

Pierre-Jean Rémy est un stendhalien, bien sûr ; mais il y a aussi du Gobineau et du Barbey d’Aurevilly dans son affaire, et peut-être même, à son insu, une pointe de D’Annunzio.

J’ajoute que notre lauréat est aux heures diurnes un excellent diplomate, dont l’attachement à l’État est aussi constant que son attachement aux lettres, ce qui ne nous est pas indifférent.

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Sur le premier Grand Prix Gobert, prix si prisé des historiens, et qui est remporté par M. Ivan Cloulas pour son Henri II, le rapport qui nous en est fait dit ceci :

 

« Il est des tranches entières de leur histoire que les Français — même cultivés — ignorent. Peut-être parce qu’elles ne sont pas dominées par une personnalité de premier plan. Ainsi le règne du fils de François ler, époux de Catherine de Médicis.

« Le père des trois derniers rois Valois souffre, selon Ivan Cloulas, d’une forme injuste d’obscurité, qui n’est pas due exclusivement aux personnalités fortes de son père et de... sa veuve. C’est son image, surtout, qui lui est défavorable ; le tournoi inutile et tragique de 15 5 9, la trop belle Diane et le château d’Anet ne sont contrebalancés par aucun tableau grandiose.

« Et pourtant, c’est sous son règne qu’ont eu lieu des événements déterminants : Cateau-Cambrésis, le retour de Calais à la France, l’annexion de Metz, Toul et Verdun, l’essor de la poésie et de la prose françaises modernes...

« En six cents pages drues, Ivan Cloulas rend à la France une période de son histoire dont elle n’a pas à rougir plus que d’une autre — 1547­15 5 9. Après le désastre de Pavie et ses incalculables conséquences, avant le tourbillon sanglant des guerres de Religion, le règne d’Henri II peut même paraître une embellie entre deux vagues d’intempéries. »

Le rapport que vous venez d’entendre est dû à un bon connaisseur du « mal français », M. Alain Peyrefitte, auquel nous avons une toute particulière raison d’exprimer aujourd’hui notre amitié.

Le deuxième Grand Prix Gobert va à M. Marc Vigié pour Les Galériens du Roi, dont certains d’entre nous, dans un autre jury, avaient entendu les mérites défendus par M. Fernand Braudel, avec la compétence, l’autorité, la conviction, la chaleur que nous lui connaissions et qui nous laissent bien de la nostalgie.

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M. André Sernin reçoit le Grand Prix de la Critique pour son livre : Alain, un sage dans la cité. C’est la première biographie vraiment complète de ce maître de pensée qui eut tant d’influence sur son temps et en conserve sur le nôtre, à travers les esprits qu’il forma, qu’il aida à se révéler à eux-mêmes. André Maurois, qui s’institua le Platon de ce Socrate, aurait certainement ratifié les termes dans lesquels M. Maurice Schumann concluait son rapport :

 

« Grâce à la patiente lucidité d’André Sernin, les élèves d’Alain (c’est-à-dire tous ceux qui l’ont suivi sur les chemins de la vraie liberté) savent que l’histoire de leur maître ne fut pas seulement l’histoire de ses pensées.

« Ainsi donc il adressait, entre un cours sur Hegel et un propos sur le Cimetière marin, des vers d’adolescent à la bien-aimée absente ! Peut-être cette ressemblance entre ses soixante ans et nos dix-huit ans nous livre-t-elle le secret de son ascendant et de notre connivence. »

C’est M. Henri Gouhier quia bien voulu nous exposer les qualités de l’ouvrage auquel revient le Grand Prix de l’Essai :

« M. René Pomeau, professeur à l’université de Paris-Sorbonne, a décidé d’entreprendre une nouvelle histoire de la vie et de la pensée de Voltaire à partir de l’extraordinaire documentation dont nous disposons aujourd’hui, et la Voltaire Foundation, d’Oxford, a immédiatement accepté d’en assurer l’édition ; elle aura cinq volumes paraissant au rythme d’un par an. Le premier a été publié en 1985 sous le titre : D’Arouet à Voltaire, 1694-1734.

« Cet ouvrage rassemble tout ce que l’on peut actuellement savoir sur Voltaire jusqu’à la quarantaine. Ces trois cent soixante-dix pages nous montrent deux choses. La première est que l’érudition la plus minutieuse n’est pas incompatible avec les qualités proprement littéraires d’un texte quand l’érudit a l’art de composer, le souci d’employer le mot juste, ce qui évite les paroles inutiles, et le sentiment que l’histoire d’un homme n’est jamais simple, à plus forte raison quand cet homme est Voltaire. La seconde est que dans la vie d’un philosophe on ne saurait séparer, d’un côté une suite d’anecdotes et d’aventures, de l’autre une suite de pensées, ce qui permet de se débarrasser tantôt de l’une, tantôt de l’autre. Il est,
certes, difficile de respecter une union qui n’est pas toujours une unité l’exemple de M. René Pomeau prouve que ce n’est pas impossible. »

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Le Grand Prix de la Nouvelle n’a pas été attribué cette année. Non que n’aient paru plusieurs recueils dignes de le recevoir. Mais voilà leurs auteurs avaient tous déjà reçu ce prix.

Passons au Grand Prix du Théâtre. Je vais, à son propos, vous communiquer le commentaire d’un expert :

« C’est certainement la première fois que l’Académie française décerne un de ses prix prestigieux à un clown.

« M. Raymond Devos reçoit en effet cette année le prix qui salue l’œuvre originale d’une personnalité éminente de la scène française.

« Auteur et interprète incomparable de ses propres textes, M. Devos pourtant se veut clown. Clown sans maquillage, mais clown quand même. Il tient à cet emploi et y trouve sa fierté. Il a raison si l’on pense que ses vrais parents sont les clowns de Shakespeare. Comme eux il jongle avec les mots, les double-sens, les à-peu-près, les calembours, aussi éblouissant dans ses arabesques verbales que dans le jeu aérien de ses balles de couleurs. Avec des souplesses d’ange, ahurissantes pour un corps aussi pesant et ventru, il danse — encore comme les clowns shakespeariens — sur le fil invisible tendu entre la raison et la folie ; il joue du paradoxe et de l’insolence ; il se moque de l’homme dont il se veut la marionnette ahurie ; il bouffonne gaiement, n’oubliant pas qu’un jour il sera lui aussi, le pauvre Yorrick.

« Plus près de nous, le poète Devos est dans la lignée de Prévert et de Queneau ; il s’épanouit dans la cocasserie de l’absurde. Alfred Jarry et Max Jacob l’eussent aimé et admiré. L’Académie française a tenu à lui faire savoir qu’elle applaudissait elle aussi à son grand talent. »

Chacun, dans ce rapport, aura reconnu la plume de M. André Roussin.

Restons dans le spectacle, mais en glissant du théâtre au cinéma. Nous savons qu’il n’est spectacle qui ait portée et durée s’il n’est appuyé sur un texte, exprimé ou non. Marcel Pagnol, Jean Cocteau, René Clair en ont, chacun dans sa manière et son style, témoigné parmi nous.

Notre Grand Prix du Cinéma va donc à un auteur de films, pour son écriture.

C’est l’écriture de Nuit et Brouillard, son agencement intellectuel, qui en a gravé si profondément les images dans nos mémoires. Nous en avions vu de semblables hélas dès 1944. Et pourtant c’est Nuit et Brouillard, daté du milieu des années 5o, qui demeure.

Si toute une génération a rêvé sous les plafonds de Marienbad, c’est à cause d’une certaine écriture filmée.

M. Alain Resnais cette année a tenu la gageure d’adapter Mélo, d’Henri Bernstein, et de faire, d’un théâtre qu’on disait à jamais disparu, un chef-d’œuvre de cinéma.

On comprendra donc que, à toutes les palmes que M. Resnais a moissonnées depuis trente ans et pour des œuvres très diverses, dans tous les festivals cinématographiques du monde, nous ayons ajouté cette palme académique.

Le prix d’Aumale est décerné par l’Institut de France, mais sur proposition de l’Académie française. Nous l’avons réservé cette année à Mme Marcel Brion, afin de mettre en lumière le labeur si patient, éclairé, intelligent qu’elle accomplit pour la publication des inédits de Marcel Brion, permettant qu’apparaisse dans sa totalité l’œuvre de notre confrère, à laquelle, d’année en année, des travaux et des thèses sont consacrés, notamment outre-Rhin. Travail vraiment méritoire, car si chaque page retrouvée peut être une richesse pour l’érudit, elle est pour l’épouse une lame tournée dans le cœur.

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J’ai regret de ne pouvoir rendre un hommage personnel à chacun de nos lauréats ; ils sont cent trente-trois cette année. Mais leurs mérites particuliers, qu’ils m’en croient, ont été très attentivement étudiés par l’Académie. Notre directeur en exercice en lira tout à l’heure, suivant l’usage, la liste complète.

Vous ne manquerez pas de remarquer, au fil de cette lecture, que le Liban y est deux autres fois présent avec Mme Andrée Chédid, qui a reçu le prix Pierre de Régnier, et M. l’Ambassadeur Camille Aboussouan, pour son beau livre sur l’architecture libanaise.

 

Vous noterez également 1 es distinctions qui vont à l’ensemble des travaux d’un auteur. C’est le cas pour M. Jean Blot, et pour M. Éric Ollivier, romanciers tous deux et tous deux essayistes, pour M. Claude Paillas, spécialiste des événements contemporains, pour M. Robert Lacour-Gayet, historien fort estimé dont les livres sur les États-Unis et les grandes nations anglophones constituent des ouvrages de référence.

Nos lauriers sont rarement répétitifs. Le prix d’Académie que reçoit Mme Bernardine Melchior-Bonnet pour La Grande Mademoiselle veut être un rappel du Grand Prix Gobert qu’elle eut naguère.

Nous n’avons pas oublié que la chanson est aujourd’hui la forme la plus vivante, et la seule populaire, de la poésie. M. Yves Duteil est acclamé par de vastes auditoires. Le nôtre, restreint, a voulu lui faire savoir que son jeune talent a percé nos murs centenaires, et que nous lui savons gré de chanter la langue de France comme il faut la chanter.

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Messieurs,

Il m’est bien agréable d’avoir à signaler que tous nos prix sont désormais exemptés de prélèvement fiscal. Cette disposition rompt heureusement avec des prescriptions administratives dont nous demandions vainement, depuis des années, la levée et dont notre confrère Michel Déon rappelait l’an dernier qu’elles conduisaient à faire de l’État, à travers ses collecteurs d’impôts, le mieux doté de nos lauréats.

Enfin nous avons été entendus. Enfin, il s’est trouvé un ministre, d’État précisément, pour apprécier que la meilleure façon de récompenser le talent, de stimuler la création et de stimuler le mécénat, n’était pas forcément, de la part de la puissance publique, de taxer la générosité privée à travers ses bénéficiaires.

Les prix littéraires, les nôtres et les autres, sont des marques de reconnaissance, bien souvent uniques, dans une vie d’auteur.

 

Ce sont souvent aussi de véritables aides pour une jeunesse encore incertaine d’elle-même, ou pour des créateurs de grande valeur mais de petite audience.

Ce sont enfin, et plus fréquemment qu’on ne le sait, le dernier trait de lumière de bien des crépuscules. Un rayon de soleil, cela ne se taxe pas.

L’Académie, au cours de son histoire, ne s’est jamais privée, en usant avec mesure et rareté, d’émettre des critiques ou réserves à l’adresse des gouvernements, dans des domaines qui la regardent.

Elle n’hésite pas, de la même manière, à saluer un acte gouvernemental qui allie le bon sens, la bonne morale et les bons sentiments. Elle n’oubliera pas le nom de M. Édouard Balladur.

Cela nous permet de laisser savoir à ceux qui nous entendent que le total de nos prix et subventions accordés au titre de nos fondations littéraires affleure les deux millions de francs, cependant que les prix dits de dévouement, secours, bourses, aides aux familles, subventions à de grands organismes charitables, répartis sur nos fondations à caractère social, dépassent les trois millions.

Grâces en soient rendues à nos donateurs passés et présents qui ont permis que l’Académie française soit l’une des premières maisons de la générosité.

Grâces soient rendues également à ceux de mes confrères qui m’aident à ce que cette générosité soit gérée avec exactitude et répartie avec autant de justice qu’il se peut.

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ll me revient enfin, Messieurs, de vous entretenir de l’état de la langue, puisque sa surveillance est notre mission première. M’en étant publiquement expliqué, durant l’année, à plusieurs reprises, ici et dans d’autres enceintes, je puis me contenter de dresser cet état à grands traits.

Quantitativement, il est bon, très bon, et permet les meilleurs espoirs.

 

Je ne sais quels statisticiens chagrins, avides de décadences, s’obstinent à répéter que nous ne nous compterions que cent vingt ou cent trente millions de francophones en tout sur la terre, ni comment ils parviennent à ce calcul de misère. Si j’ajoute aux francophones d’Europe ceux du Québec et de toutes les autres provinces du Canada, si j’additionne les populations du Sénégal, de Côte-d’Ivoire, et des autres pays d’Afrique occidentale et centrale, et celles encore de plusieurs États insulaires, qu’ils s’appellent Haïti ou Madagascar, si je regarde le Maghreb et constate que tous les jeunes Marocains font désormais entre six et neuf ans de scolarité en français en même temps qu’en arabe, je n’obtiens pas du tout le même chiffre que les statisticiens chagrins.

Ont-ils décidé d’éliminer de leurs calculs les peuples bilingues ou qui se sont irréversiblement engagés dans la voie du bilinguisme, parce qu’elle est celle qui assure leur personnalité nationale ?

Négligent-ils que le Zaïre, par exemple, dont le français est la langue nationale, s’il compte trente millions d’habitants aujourd’hui, en aura le double dans trente ans ?

Dans de notables parties, l’Extrême-Orient montre son attachement au français ; le Proche-Orient aussi. Il y a en Égypte six mille bacheliers en français, et qui demandent une université francophone. C’en est fini du français peau de chagrin. Et je pense n’être nullement hors de proportions quand j’avance que la francophonie rassemblera un demi-milliard d’êtres humains dans les années 2020-2030, et sans doute le dépassera.

Nous aimerions que la prochaine grande conférence des pays francophones, qui se tiendra à Québec en septembre prochain, se penchât sur les évaluations pour le demi-siècle à venir. Elles nous donneront la mesure de l’espoir, mais aussi la mesure des besoins.

Je ne puis manquer de citer à ce propos une phrase de M. Gabriel de Broglie que nous pouvons faire nôtre : « Ne jamais dissocier le point de vue national du regard international. Ne jamais détacher la cause du français de la cause de la francophonie. »

C’est en ce sens que la création d’un département ministériel chargé des affaires de la francophonie répondait bien à une nécessité.

Qualitativement, je ne saurais me montrer aussi optimiste.

 

Certes, la dégringolade de l’enseignement du français, à partir des petites classes, est arrêtée. Il est admis que pour penser et s’exprimer, l’apprentissage des mots, de leur sens et de leur agencement n’est pas absolument inutile. La remontée est-elle amorcée ? Nous aimerions en être assurés.

À l’autre bout de la chaîne, je veux dire dans le haut enseignement, la recherche et la communication, la situation, pour ce qui est des sciences, demeure assez déplorable. L’anglais y règne toujours en maître, ou plutôt ce que Jean Bernard appelle « l’anglo-sabir ». Car il est évident que faire parler l’anglais à des gens de tout pays, qui ne l’ont pas appris, n’améliore pas non plus cette langue.

On ne peut obliger nos savants à user du français pour des auditoires vides. Mais on pourrait consacrer un peu plus d’efforts, je veux dire d’argent, à pourvoir de traductions simultanées les congrès qui se tiennent en France, ou de traductions juxtalinéaires les revues scientifiques qu’on publie en France... en anglais. Je sais des fonds moins utilement employés.

L’autre grande affaire est celle de la qualité du français diffusé, informations, spectacles ou divertissements, par les moyens audiovisuels ; l’affaire de la publicité aussi, qui, pour attirer le chaland, torture ou défigure à plaisir le français.

Il y a quarante ans, André Gide écrivait — je l’ai relevé cette semaine dans un magazine parisien : « Je déplore qu’une censure sévère ne soit pas appliquée aux textes, par exemple, des “sous-titres” de cinéma qui, trop souvent, étalent des fautes grossières et les inculquent en quelque sorte au public. De même, les speakers de la radio imposent trop souvent une prononciation défectueuse. Ces émissions ne devraient-elles pas être impeccables ? »

Et Gide de remarquer d’autre part « qu’en chaque Français cultivé sommeille un Vaugelas ». Peut-être. Mais, depuis quarante ans, ce Vaugelas a vraiment sommeillé à poings fermés.

C’est parce que la loi sur l’audiovisuel, instituant une Commission nationale de la communication et des libertés, a inscrit au nombre des missions de celle-ci de veiller à « la défense et l’illustration de la langue » que l’Académie, à l’initiative de MM. Alain Peyrefitte et Edgar Faure, a demandé d’y avoir un représentant. Le législateur a fait droit à notre requête. Pour siéger à cette commission nous avons désigné l’un des nôtres, qui a commencé sa carrière civique lors de la manifestation d’étudiants — ils n’étaient que trois cents en ce temps-là — du 11 novembre 1940 devant l’Arc de Triomphe, ce qui lui donne quelques titres à l’appréciation des libertés, et qui a commencé sa carrière professionnelle en août 1944, en transmettant au pays la descente des Champs-Élysées par le général de Gaulle, ce qui implique quelque expérience dans la communication. Nous faisons confiance à M. Michel Droit.

Parce que le vocabulaire est la part la plus subtile à la fois et la plus durable de notre héritage, et qu’il est de notre mission de le faire fructifier, nous avons publié, comme nous nous y étions engagés, le premier fascicule de la nouvelle édition du Dictionnaire. La publication se poursuivra sur douze ans. Qu’on ne sourie pas trop de notre lenteur, et qu’on veuille bien la comparer à d’autres entreprises aussi ardues. Le fameux Oxford English Dictionary, commencé il y a un siècle, a été terminé en 1928. Dans les années cinquante, il avait été décidé de lui donner un supplément, d’un seul volume, qui devait paraître sept ans après. Ce supplément vient seulement de voir le jour en cette année 1986. Le Dictionnaire des parlers vaudois, auxquels nous portons attention, a été commencé en 19o3. Ses rédacteurs en sont à la lettre F.

Notre Compagnie, cette année, a, j’ose le dire, travaillé convenablement. Nous n’avons pas à nous sentir indignes du passé ; nous n’avons pas à nous sentir coupables devant l’avenir.

Cet avenir m’a fait un signe ce matin même. Dans mon courrier, j’ai trouvé la lettre, sans faute d’orthographe, d’une élève d’un collège de Sarreguemines, m’annonçant qu’avec une quinzaine de ses camarades, elle avait fondé un club « Académie française ». Je ne pouvais vous cacher, Messieurs, une si bonne nouvelle. Voilà donc un club qui, pour quinze membres, aura, si vous le voulez bien, quarante parrains. C’est par là que je terminerai mon propos.