DISCOURS
Prononcé le 3 Décembre 1768,
Par M. l’Abbé BATTEUX, Directeur de l’Académie, au Roi de Danemarck, lorfque ce Prince y vint pour prendre féance.
SIRE,
UNE Reine voiſine de vos Etats[1], & qui a honoré cette Compagnie de ſa préfence, quitta le Trône pour aller étudier les hommes. Votre Majeſté a penſé que c’étoit après les avoir étudiés & connus, qu’il falloit régner.
Votre premier empreſſement, en arrivant en France, devait être de connoître la perſonne du Roi. Vous avez attaché ſur lui tous vos regards, & vous êtes entré dans les ſentimens de la Nation qui l’a ſurnommé le Bien-Aimé.
La Nation, de ſon côté, touchée de vos qualités rares, vous a compris dans l’amour qu’elle a pour ſon Roi, parce qu’elle a jugé que vous étiez né, comme lui, pour rendre les Peuples heureux.
L’honneur que Votre Majeſté fait aujourd’hui aux Lettres Françoiſes, en ſeroit un nouveau garant. Quiconque fait cas de Corneille, de Boſſuet, de Fénelon, de Monteſquieu, s’il eſt Roi, ne peut manquer d’être un Roi juſte & ami des hommes.
Le Nord ſe livre à une ſi douce eſpérance ; cette partie de l’Europe, déjà ſi riche en grands exemples, aura dans Votre Majeſté un exemple auſſi grand & plus touchant qu’aucun autre, celui de l’humanité ſur le Trône.
[1] La Reine Chriftine de Suède.