De nombreuses personnes sont inquiètes et agacées par la prolifération des anglicismes dans notre langue. Cette prolifération n’est pas récente. En témoigne cet extrait de l’Épître à Boileau sur les mots nouveaux, un texte que l’académicien Jean-Pons-Guillaume Viennet lut en séance publique de l’Institut en 1855, et dans lequel il s’efforce de défendre notre langue tout en se louant de la concorde qui grandit entre la France et l’Angleterre.
« On n’entend que des mots à déchirer le fer,
Le railway, le tunnel, le ballast, le tender,
Express, trucks, wagons ; une bouche française
Semble broyer du verre ou mâcher de la braise. […]
Certes de nos voisins l’alliance m’enchante,
Mais leur langue, à vrai dire, est trop envahissante
Faut-il pour cimenter un merveilleux accord
Changer l’arène en turf et le plaisir en sport,
Demander à des clubs l’aimable causerie,
Flétrir du nom de grooms nos valets d’écurie
Traiter nos cavaliers de gentlemen-riders ;
Et de Racine un jour parodiant les vers,
Montrer, au lieu de Phèdre, une lionne inglèse,
Qui, dans un handicap ou dans un steeple-chase,
Suit de l’œil un wagon de sportsmen escorté,
Et fuyant sur le turf par le truck emporté ? »