INAUGURATION DE LA STATUE DE M. ROYER-COLLARD
À VITRY-LE-FRANÇOIS
le 24 novembre 1847
MESSIEURS,
Après les hommages qui viennent d’être si dignement rendus à l’illustre mémoire consacrée par ce monument, quelques paroles de plus ne sont point nécessaires. Permettez-les toutefois à 1’expression de sentiments dont je me trouve ici, par l’honorable choix qui m’associe au Directeur de l’Académie française, le naturel, quoique trop faible organe.
Je suis de ceux auxquels s’adressèrent autrefois les mémorables leçons par lesquelles M. Royer-Collard ouvrit en France, aux études philosophiques, une voie nouvelle ; de ceux qui, pendant une vie consacrée, sous ses auspices, à l’instruction publique ont été les assidus témoins de tout ce qu’il a fait pour elle. Il peut m’être accordé de me rendre l’interprète de ces écoles reconnaissantes, que son enseignement a honorées à jamais, que son administration a régénérées et agrandies, qu’il a sauvées, dans des jours difficiles, par le respect tutélaire attaché à son nom, qu’anime et protége toujours son souvenir.
Cette solennité noble et touchante, où votre patriotisme acquitte envers M. Royer-Collard la dette de la France, est pour l’Université, qui ne m’en désavouera pas, une fête domestique. Elle se souvient, avec un juste orgueil, que tout ce que le monde a admiré et célèbre encore chez M. Royer-Collard, l’élévation des principes, l’originalité de la pensée, les grâces sévères du langage, avant de briller du plus vif éclat sur le théâtre de la vie publique, avait éclairé l’ombre de ses studieux exercices ; que ce maître, accepté de tous, qui a enseigné, comme on l’a dit si bien, par quelques discours immortels, les règles de la vraie liberté, par les exemples de sa vie entière, les vertus qui en rendent digne, avait été d’abord le plus respecté de ses maîtres.
Puissent les disciples ne jamais lui manquer dans notre patrie ! puisse cette image, qui a reçu, avec l’empreinte fidèle de ses traits, celle de sa puissante intelligence, de son éloquente conviction, de sa dignité, de son autorité morale, être toujours l’objet d’un culte pieux, et entretenir dans les âmes, comme un vivant symbole, la religion du vrai et de l’honnête !