Dire, ne pas dire

Ilan L. (Paris)

Le 2 octobre 2024

Courrier des internautes

J’ai une question à propos de la prononciation de j’ai dans le français parlé de nos jours. Je sais qu’il existe deux prononciations différentes : « jè » et « jé ». À quoi doit-on cette différence? Accents régionaux, classes sociales, facteurs strictement individuels ? Y en a-t-il une qui est plus « correcte » que l’autre ?

Est-ce la même chose avec l’imparfait, le passé simple et le futur simple à la première personne du singulier je regardais/je regardai/je regarderai ?

Ilan L. (Paris)

L’Académie répond :

Traditionnellement les formes verbales en -ai (présent du verbe avoir, passé simple et futur) se prononcent é, tandis que les formes verbales en -ais, -ait et -aient (imparfait et conditionnel présent) se prononcent avec è. Mais force est de constater que cette norme varie en fonction des régions (en Normandie, par exemple, on ferme ordinairement toutes ces voyelles), mais aussi parfois en fonction des individus. On constate de plus aujourd’hui le développement d’une voyelle de timbre intermédiaire, située entre é et è. Aucune de ces prononciations n’est considérée comme fautive, mais il est important de connaître les prononciations canoniques puisque, bien souvent, les poètes ont pu en jouer. Ainsi dans le poème de Verlaine « Promenade sentimentale » peut-on lire :

« Le couchant dardait ses rayons suprêmes

Et le vent berçait les nénuphars blêmes »

L’assonance entre les 5e et 10e syllabes de ces deux vers (dar)dait/(su)/prêmes et (ber)çait/blêmes, qui renforce la musicalité du poème, serait moins perceptible si l’on ne conservait pas aux terminaisons d’imparfait leur è ouvert.