COMPLIMENT fait dans l’Archevêché le 16 Avril 1674, par Mr. l’Abbé TALLEMANT le jeune, à Monseigneur l’Archevêque de Paris sur la dignité de Duc et Pair, où le Roi venait de l’élever.
MONSEIGNEUR,
Vous procurez tant d’honneur à l’Académie Française par le nouveau rang que vous venez d’acquérir, qu’il est bien juste qu’elle vienne vous témoigner en même temps sa joie et sa reconnaissance. Il lui doit être bien doux de voir les plus illustres de son Corps élevés ainsi aux premières dignités, et l’éclat qui tombe sur eux rejaillit infailliblement jusques sur elle. J’ose toutefois vous dire, MONSEIGNEUR, que l’Académie est moins sensible à l’honneur qu’elle reçoit qu’à la justice qu’on vous rend. Remplie comme elle est de Pairs, de Prélats, de Ministres, honorée de la protection d’un Roi glorieux ; et d’ailleurs ne prenant intérêt qu’à ce qui regarde la vertu, il y a apparence que le nouveau Titre que vous acquérez ne l’eût pas si fortement touchée, si elle ne le regardait comme une récompense du mérite : et ce qui lui donne une joie sensible, c’est de voir ainsi couronner l’Éloquence dont elle fait sa principale et sa plus chère étude ; et de remarquer en même temps que la main du plus grand des Rois de plus en plus semble s’accoutumer à répandre ses bienfaits sur le savoir et sur la vertu ; car enfin, MONSEIGNEUR, quelque bienséance qu’il y eût à donner à la dignité d’Archevêque de Paris, le rang où vous l’élevez, elle l’aurait longtemps attendu si vous ne l’aviez possédée. Vous répandez cette marque d’honneur, qui est accordée à votre seule Personne sur une postérité qui vous est étrangère ; et c’est une gloire toute nouvelle, et qui vous est particulière d’acquérir de nouveaux Titres et de nouveaux honneurs aux dignités que vous possédez. Ce n’est pas ici le lieu, MONSEIGNEUR, de s’abandonner à ce que l’Académie pourrait penser et dire sur votre sujet ; elle ne doit pas vous retenir longtemps quand tout le Royaume s’empresse de vous applaudir. Souffrez seulement qu’elle espère que ces nouvelles dignités, vous approchant davantage de la Couronne, elle va trouver en vous encore un plus fort appui. L’Éloquence et le Savoir vous ont produit d’assez grands avantages, pour croire que vous aimerez toujours ceux qui en sont une profession particulière ; et c’est de leur main aussi que vous recevrez les Éloges qui sont dus à votre vertu. Oui, MONSEIGNEUR, si l’Académie Françoise mérite la réputation qu’elle a acquise, et la royale protection que vous lui avez procurée, elle instruira la postérité des obligations qu’elle vous a, et des grandes qualités qui vous ont si justement acquis l’estime et la confiance du plus grand Roi du monde.